La libération de l'opposante Aung San Suu Kyi, après plus de sept ans de résidence surveillée, a été accueillie avec soulagement par la communauté internationale, qui espère que ce sera un premier pas vers un changement en Birmanie et la libération des autres détenus politiques.

Des défenseurs des droits de l'Homme y ont cependant vu un stratagème de la junte militaire pour atténuer la pression internationale.

Prix Nobel de la paix 1991 et symbole de la lutte pour la démocratie en Birmanie, Aung San Suu Kyi n'avait plus circulé librement depuis mai 2003.

Sa libération est «certes la bienvenue mais ne fait que marquer la fin d'une condamnation injuste» et «ne représente en aucun cas une concession de la part des autorités», a observé à Londres l'organisation de défense des droits de l'Homme, Amnesty International.

Pour Elaine Pearson, responsable à Bangkok de l'association Human Rights Watch (HRW), «sa libération est un stratagème profondément cynique du gouvernement militaire pour détourner l'attention de la communauté internationale des élections illégitimes» que la junte militaire a organisées dimanche dernier.

«Je suis très, très soulagé», a réagi le secrétaire général de l'Association des nations d'Asie du sud-est (Asean), le Thaïlandais Surin Pitsuswan, à Yokohama (Japon) où il participait au Forum économique Asie-Pacifique (Apec).

«J'espère que cela va contribuer à la réconciliation nationale en Birmanie», a-t-il ajouté, espérant que «d'autres prisonniers politiques bénéficieront également de ce geste».

Egalement à Yokohama, le président américain, Barack Obama, prix Nobel de la paix 2009, s'est félicité d'une libération «longtemps espérée» et a rendu hommage au «combat courageux» d'Aung San Suu Kyi. «Il est temps pour le régime birman de relâcher tous les détenus politiques, pas un seul», a-t-il ajouté.

La chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a demandé aux dirigeants birmans de garantir sa liberté de mouvement et d'expression.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a également appelé la junte à «consolider le geste d'aujourd'hui en libérant tous les autres prisonniers politiques».

L'Australie s'est prononcée dans le même sens en demandant la libération «immédiate et inconditionnelle des plus de 2.000 prisonniers politiques» et a appelé les autorités birmanes à engager «un processus de reconciliation nationale et un dialogue avec tous les groupes ethniques» du pays.

Pour les Philippines, il reste à savoir si les généraux birmans «prendront d'autres mesures substantielles vers une démocratisation». Le Japon s'est félicité d'un «pas en avant» mais a espéré «d'autres mesures positives» et le Brésil a appelé à des «réformes destinées à établir des institutions démocratiques dans le pays».

La libération a été chaleureusement saluée par des lauréats du Prix Nobel de la Paix réunis à Hiroshima. «C'est merveilleux», s'est ainsi écrié l'ancien président sud-africain Frederik Willem De Klerk.

Selon la Grande-Bretagne, 2.100 autres prisonniers politiques sont détenus en Birmanie.

La libération d'Aung San Suu Kyi «aurait dû être faite depuis longtemps», a déclaré le Premier ministre britannique, David Cameron.

Pour Berlin, «son pacifisme et son intransigeance ont fait d'elle un modèle».

La France a mis en garde Rangoun contre «toute entrave à la liberté de mouvement et d'expression» d'Aung San Suu Kyi, et la Commission européenne a jugé «crucial» qu'elle ait une totale liberté et «puisse participer pleinement au processus politique de son pays».

Stockholm, Ottawa et Johannesburg ont aussi salué sa libération et demandé l'élargissement des autres prisonniers.

La Chine, l'un des plus proches alliés de la junte birmane, n'a pas immédiatement réagi, mais l'agence officielle Xinhua a annoncé la libération en qualifiant Aung San Suu Kyi d'«importante figure politique».

Pékin, membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU et qui a emprisonné le dissident Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix 2010, protège la Birmanie d'éventuelles sanctions de l'ONU sur la situation des droits de l'Homme.