Kim Jong-Il, auquel devrait succéder son fils cadet, dirige la Corée du Nord d'une main de fer depuis 1994 et laissera à son successeur une économie moribonde dans un pays marqué par une famine meurtrière et de graves pénuries alimentaires à répétition.



Kim Jong-Il, 68 ans, à la santé chancelante depuis deux ans, utilise la propagande, un culte exacerbé de la personnalité, une armée docile et les camps de travail pour maintenir son pouvoir, comme son père avant lui.

Il a donné tort à ceux qui prévoyaient un effondrement du régime après l'assèchement de l'aide soviétique au début des années 90. À la fin de cette décennie, une famine a tué jusqu'à un million de personnes, mais il est resté «le Cher Leader» et a continué un programme de fabrication d'armes nucléaires, marqué par deux essais, en octobre 2006 et mai 2009.

La Corée du Nord connaît régulièrement des pénuries alimentaires sérieuses et le Fond pour l'enfance de l'ONU estime qu'un tiers des enfants souffrent de malnutrition.

Kim Jong-Il a été victime d'une attaque cérébrale en août 2008. Il souffrirait également de problèmes rénaux, de diabète et d'une tension élevée.

Plus inquiétant, les analystes estiment que ses décisions sont de plus en plus erratiques, telles celle de torpiller en mars 2010 une corvette sud-coréenne, causant la mort de 46 marins et entraînant une volée de sanctions. Malgré les conclusions d'une enquête internationale, la Corée du Nord dément toute responsabilité dans le torpillage.

Les analystes voient dans ces actes le fruit des effets secondaires de l'attaque cérébrale, ou sa volonté d'assoir à tout prix son plus jeune fils sur le trône du prétendant.

Le patron de la CIA, Leon Panetta, avait prévenu en juin que le monde entrait dans «une période dangereuse» car Jong-Il voulait prouver la crédibilité de son fils aux yeux des militaires, en entreprenant des actions risquées.

Son état de santé est un secret d'État, tout comme sa biographie, qui s'inscrit d'emblée dans la légende.

Kim Jong-Il est un héritier élevé dans la nomenklatura communiste, mais la propagande le fait naître le 16 février 1942. Une étoile et un double arc-en-ciel seraient apparus ce jour-là. Certains rapports le font naître en 1941.

La montagne où il serait né, le Mont Paekdu, le plus haut sommet du pays (2.744 mètres), à la frontière chinoise, est sacrée. C'est là, dit-on, qu'est née la Corée.

En fait, la plupart des historiens considèrent que Kim est né en Russie, dans un camp d'entraînement des partisans communistes d'où son père Kim Il-Sung a dirigé la guerre de résistance contre l'envahisseur japonais jusqu'en 1945.

Diplômé en économie politique, le jeune homme grimpe les échelons de la nomenklatura du Parti des Travailleurs de Corée (PTC) au pouvoir. Il s'occupe notamment de propagande.

Désigné comme successeur à son père, il prend offciellement les rênes du pouvoir trois ans après la mort de Kim Il-Sung en 1994.

Il a été accusé d'avoir organisé l'attentat qui a tué 17 Coréens du Sud à Rangoun, en Birmanie, en 1983, et la destruction en vol d'un avion des Korean Airlines (KAL) en 1987 (115 morts) quelques mois avant les jeux Olympiques de Séoul.

Le «Cher Leader» sait aussi très bien faire monter les enchères dans les négociations internationales entamées en 2003 pour convaincre Pyongyang de renoncer à ses ambitions atomiques.

Il a régulièrement claqué la porte de ces discussions à six pays (Corées, Chine, États-Unis, Japon, Russie) et nargué la communauté internationale en procédant à son premier essai nucléaire le 9 octobre 2006.

Les pourparlers sont gelés depuis avril 2009.

Dans cette partie de poker, Kim Jong-Il sait bien que l'arme suprême est une inestimable monnaie d'échange. À l'extérieur comme à l'intérieur, où la propagande se fait une loi de glorifier les capacités de défense nationales.