Deux manifestants ont été tués et au moins seize autres ont été blessés vendredi lors de nouveaux heurts avec la police indienne au Cachemire, région à majorité musulmane secouée par une insurrection séparatiste depuis 20 ans.

Un précédent bilan fourni par la police faisait état de la mort d'un manifestant et d'au moins huit blessés.

La police a ouvert le feu sur des manifestants qui ont défié le strict couvre-feu imposé dans la région pour descendre dans la rue et jeter des pierres sur les forces de sécurité qui ont répliqué en tirant sur la foule, a indiqué à l'AFP un policier s'exprimant sous couvert d'anonymat.

Les heurts se sont produits dans quatre endroits différents de la vallée, dont les districts de Budgam (centre) et de Baramulla (nord).

La vallée du Cachemire indien est le théâtre depuis trois mois de violentes manifestations contre l'administration de New Delhi provoquées par la mort le 11 juin d'un étudiant de 17 ans tué par une grenade lacrymogène lancée par la police. Le bilan des victimes est désormais d'au moins 96 morts.

La plupart des défilés de protestation à l'appel de dirigeants séparatistes rassemblent des centaines de jeunes hommes masqués qui jettent des pierres sur les forces de sécurité, recevant invariablement en réponse des tirs de gaz lacrymogène, des coups de bâton et des tirs à balles réelles.

Cette région himalayenne est divisée en deux, administrée d'un côté par l'Inde et de l'autre par le Pakistan. La partie indienne est le théâtre depuis 1989 d'une insurrection qui a fait au moins 47 000 morts, selon les chiffres officiels.

Le ministre pakistanais des Affaires étrangères a accusé l'Inde de «brutalité»: «Le Pakistan condamne fermement la brutalité et le scandaleux usage de la force par les forces de sécurité indiennes», a déclaré Shah Mehmood Qureshi, demandant à son voisin rival de faire preuve de retenue.

Un strict couvre-feu a été imposé dans la région depuis dimanche, provoquant des protestations d'habitants confinés chez eux qui se plaignent de la difficulté d'accès à la nourriture et aux médicaments.

«La vallée est devenue une prison et les restrictions comme la loi martiale ont été imposées pour supprimer les aspirations des Cachemeris», a déclaré une figure du mouvement séparatiste, Syed Ali Geelani, qui a appelé jeudi à des «sit-in» à partir de mardi devant des camps de l'armée et de la police.

Tous les quartiers de Srinagar ont été ceinturés de barbelés et de portes en fer et les forces de sécurité armées de fusils et de bâtons surveillaient les accès pour empêcher quiconque de défier le couvre-feu.

Ghulam Rasool Wani, un ancien employé de l'université à la retraite, confiait son incapacité à emmener sa femme à l'hôpital: «On essaie depuis trois jours d'emmener ma femme à l'hôpital mais à chaque fois on nous demande de montrer un laissez-passer», affirme à l'AFP cet habitant de Srinagar.

Cette semaine, New Delhi a annoncé l'envoi d'une délégation au Cachemire tandis que les forces de sécurité ont assuré avoir défini «une nouvelle stratégie» pour rétablir l'ordre, dans un contexte où le pouvoir est de plus en plus critiqué pour sa gestion inefficace du conflit.

L'Inde déploie l'armée

L'Inde a déployé l'armée vendredi dans la principale ville du Cachemire, Srinagar, et d'autres villes de la région à majorité musulmane secouée par des violences séparatistes pour venir en soutien aux forces paramilitaires et à la police, selon l'AFP et des habitants.

Des troupes ont été aperçues sur la route à Srinagar menant à l'aéroport, a constaté un journaliste de l'AFP.

Des habitants ont également rapporté la présence de soldats dans des villages des districts de Budgam (centre) et de Baramulla (nord) où de nouveaux heurts se sont produits vendredi entre des manifestants et la police.