La découverte du cadavre momifié d'un prétendu centenaire mort depuis trois décennies a déclenché une enquête à travers tout le Japon pour recenser les doyens âgés de plus de cent ans, dont une douzaine au moins sont portés disparus selon la presse.

L'archipel compte plus de 40 000 centenaires sur une population de 127 millions d'habitants, qui bat des records de longévité: 86,44 ans en moyenne pour les femmes, premier rang mondial, et 79,59 ans pour les hommes, cinquième rang.

L'opinion publique a été choquée d'apprendre que parmi ses doyens, certains ont apparemment disparu sans que leurs enfants, ni leurs voisins ne s'en aperçoivent ou ne le signalent.

Ainsi, les services sociaux de Tokyo ne retrouvent pas la trace de Fusa Furuya, considérée à 113 ans comme la doyenne de la capitale. Sa fille de 79 ans affirme n'avoir plus eu de relations avec sa mère depuis plus de 20 ans.

Les journaux ont de leur côté procédé à leur propre recensement à travers tout le pays et ont mis en évidence la disparition d'au moins 12 centenaires, selon le quotidien Asahi Shimbun, 15 selon le Yomiuri Shimbun, voire 18 selon le Mainichi.

Uniquement à Tokyo, où quelque 2 500 habitants ont dépassé le cap des cent ans, neuf personnes âgées de 102 ans et plus sont portées manquantes, ont souligné les journaux.

La frénésie médiatique a débuté la semaine dernière après une découverte macabre au domicile d'un habitant de Tokyo, censé être à 111 ans le doyen de la capitale.

Les fonctionnaires de l'arrondissement venus le féliciter le jour de son anniversaire ont eu des soupçons après avoir été éconduits par sa petite-fille de 53 ans affirmant que le patriarche ne voulait voir personne.

La police alertée a découvert le cadavre momifié de Sogen Kato gisant sur son lit, à côté de journaux dont le plus récent datait de 1978.

La famille a affirmé aux enquêteurs qu'il s'était cloîtré dans sa chambre il y a plus de 30 ans, en observant un jeûne afin de devenir un «Bouddha vivant». La police a ouvert une enquête pour fraude, la pension du retraité ayant continué d'être versée pendant toutes ces années.

Ce genre de faits divers n'est pas rare au Japon, où le gouvernement a délégué aux municipalités et aux services sociaux de chaque localité le soin de recenser les centenaires, avec des méthodes qui diffèrent selon les endroits, a expliqué un responsable du ministère de la Santé.

«Dans une petite ville, c'est plus facile de s'occuper d'eux en leur rendant visite. Mais dans des zones urbaines plus importantes, les services concernés se contentent souvent d'un coup de téléphone pour demander à la famille si leur parent ou grand-parent est toujours en vie», a-t-il dit.

À Tokyo, les responsables d'arrondissements se plaignent du fait que les familles empêchent souvent les travailleurs sociaux de voir les personnes âgées, a relevé le quotidien Yomiuri Shimbun.

Ces affaires mettent également en lumière une nouvelle tendance de la société japonaise où de nombreux adultes, souvent sans travail, s'incrustent chez leurs parents.

«Il existe un nombre croissant de foyers au Japon où les enfants vivent aux crochets des parents et dépendent donc de leurs pensions», a expliqué le professeur Yasuhiro Yuuki, expert des questions de protection sociale à l'université Shukutoku.

«Les enfants disent qu'ils prennent soin de leurs parents, mais en fait, ils ne font que dépenser leur retraite.»