La campagne officielle pour la succession de la présidente Gloria Arroyo et pour les élections législatives et provinciales en mai aux Philippines a été lancée vendredi sur fond de violences pré-électorales et de rumeurs de coup d'État.

Après neuf ans de pouvoir, assombris par des rumeurs de corruption et de manipulation des votes, la présidente Arroyo ne peut se représenter et sa succession va être âprement disputée. Promettant une moralisation de la politique, Benigno Aquino, fils de l'ancienne présidente Corazon Aquino décédée en août, est en tête des sondages.

Chef du Nacionalista Party (parti nationaliste), Manuel Villar, sénateur d'opposition, millionnaire ayant fait fortune dans l'immobilier, le talonne.

Parmi les candidats figure également l'ex-président Joseph Estrada, renversé en 2001 puis gracié en 2007 après une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité pour corruption.

Promettant d'être haute en couleur, la campagne pour les élections législatives verra le boxeur Philippin Manny Pacquiao, considéré comme le meilleur boxeur du monde toutes catégories confondues, tenter de décrocher un siège au Parlement, tout comme l'ancienne Première dame Imelda Marcos ou l'actuelle présidente Arroyo.

Violences et assassinats

Violences et assassinats ponctuent régulièrement les campagnes électorales et plusieurs dizaines de personnes ont déjà été tuées au cours des derniers mois, sur fond de rivalités politiques.

En novembre, 57 civils dont de nombreux journalistes, ont été tués sur l'île de Mindanao, dans le sud de l'archipel, par des hommes armés à la solde du gouverneur de la province, ancien allié de la présidente Arroyo.

Près de 200 personnes ont été inculpées de meurtres dont le gouverneur, chef d'un clan qui aurait ainsi voulu écarter un rival pour l'élection à son poste.

«Nous avons anticipé depuis longtemps une montée des violences durant la campagne», a déclaré le porte-parole national de la police, Leonardo Espina. «Historiquement, c'est à ce moment-là que les violences explosent».

Alors que les candidats à la présidentielle mènent campagne depuis début février, quelque 18.000 candidats aux élections législatives et provinciales ont dû attendre vendredi pour officiellement se lancer.

C'est précisément «au niveau local que les rivalités sont les plus fortes», estime James Jimenez, porte-parole de la commission électorale.

Outre le massacre de Mindanao, au moins 20 candidats ont été assassinés et 13 blessés avant même l'ouverture officielle de la campagne, a relevé M. Espina.

Dans un archipel en proie à des insurrections séparatistes, pas moins de 68 milices privées, à la solde de responsables locaux, défient le pouvoir central, refusant de déposer les armes, selon Rene Sarmiento, membre de la commission électorale.

La campagne est également assombrie par des rumeurs de coup d'État dans un pays dont l'histoire récente a été marquée par les dictatures, les coups d'État et les révoltes populaires. Ces rumeurs ont été entretenues par des déclarations d'une porte-parole de la présidence laissant entendre que l'armée pourrait prendre le pouvoir si les élections sombraient dans le chaos.

«Il ne s'agit que de rumeurs et spéculations», a répliqué le général Juancho Sabban, chef du corps des Marines. «Les forces armées sont là pour protéger le peuple et le vote. Nous ne suivrons pas d'ordres illégaux».

Ultime source d'inquiétude, un système de vote électronique utilisé pour la première fois et dont certains mettent en doute la fiabilité.