Des dizaines de milliers de personnes fuyaient dimanche le littoral du Japon où les autorités ont lancé la première alerte majeure au tsunami en 15 ans, craignant l'arrivée de vagues de plus de trois mètres générées par le violent séisme de la veille au large du Chili.

Plus de 70 000 personnes ont évacué dans le calme les zones côtières du quart nord de l'île principale de Honshu, où l'on attend les vagues les plus destructrices, selon les autorités locales. L'alerte est diffusée à intervalle régulier par haut-parleurs, entrecoupée du son des sirènes.

«Un tsunami pouvant aller jusqu'à trois mètres de haut est attendu sur le littoral Pacifique du Japon», a déclaré lors d'une conférence de presse un responsable de l'Agence météorologique japonaise, Yasuo Sekita. L'arrivée de la vague sur l'archipel était prévue vers 13h00 locales, a-t-il précisé.

En 1960, quelque 140 personnes avaient été tuées au Japon par un tsunami causé par un tremblement de terre de magnitude 9,5 au Chili, le plus violent jamais enregistré dans le monde. A cette occasion, «les vagues étaient devenues de plus en plus puissantes après la première», a rappelé M. Sekita. «Nous pensons que ce sera le cas cette fois aussi».

L'Agence a lancé une alerte au tsunami pour l'ensemble de la façade Pacifique du Japon. Le niveau de la mer pourrait monter brusquement de plus de trois mètres sur les côtes des préfectures d'Aomori, Iwate et Miyagi (nord) et de deux mètres partout ailleurs, y compris dans la mégalopole de Tokyo.

C'est la première fois depuis 15 ans qu'une alerte «rouge», la plus grave, est lancée dans l'archipel.

Plus de 70 000 personnes ont été évacuées dans le calme dans les trois préfectures les plus exposées et dans l'île septentrionale de Hokkaido, selon les autorités locales. D'après la télévision publique NHK, quelque 150 000 foyers à travers le pays ont reçu l'ordre ou le conseil d'évacuer.

A Ofunato, dans la préfecture d'Iwate, des résidents empaquetaient à la hâte couvertures et vêtements avant d'être regroupés dans des écoles et des centres communautaires. La garde côtière a ordonné aux navires croisant près du rivage de s'éloigner pour éviter d'être précipités sur les côtes.

«Les pêcheurs ont mis leur bateau à l'abri dans le port», a raconté à l'AFP Tomiko Kusaka, qui vit dans le petit village de Yamamoto-cho, dans la préfecture de Miyagi. «Les pompiers et la police vont de maison en maison pour dire aux gens de se préparer à évacuer».

Yoshinobu Tsuji, professeur à l'Institut de recherches sur les séismes à l'université de Tokyo, a mis en garde contre l'éventualité de plusieurs tsunamis successifs, «trois ou quatre heures après le premier».

«Les gens ne doivent pas retourner chez eux tout de suite après la première vague», a-t-il dit sur la chaîne publique NHK. «Il faut trouver refuge dans des immeubles solides, au deuxième étage ou même encore plus haut. Ou bien dans des endroits d'au moins six mètres de haut», a-t-il conseillé.

La Russie a également déclaré l'alerte au tsunami sur sa côte Pacifique. Des ordres d'évacuation ont été émis pour les habitants de la péninsule faiblement peuplée du Kamtchatka et de l'île de Sakhaline.

Le séisme de magnitude 8,8, qui a frappé samedi le Chili et fait plus de 300 morts, selon un bilan encore provisoire, est l'un des plus violents depuis un siècle.

Le tsunami généré par ce séisme avance à plus de 700 kilomètres/heure. «Au milieu de l'océan, la vague avance à la vitesse d'un avion à réaction», a affirmé le professeur de géologie à l'université du Colorado Roger Bilham.

Peu après le séisme, une vague de 2,34 mètres de haut s'est abattue sur la ville chilienne de Talcahuano, où la mer a pénétré dans les rues. Le tsunami a fait cinq morts et onze disparus sur l'île chilienne de Robinson Crusoe, située dans le Pacifique sud à 700 km de la côte chilienne.

L'alerte déclenchée samedi dans tout l'océan Pacifique a été levée partout après le passage du tsunami, sauf au Japon et en Russie. Des vagues allant de quelque centimètres à 1,5 mètre se sont abattues sur l'Etat américain de Hawaii, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Polynésie française et plusieurs autres îles du Pacifique, sans faire de victime.

Aux Philippines, des milliers d'habitants des régions côtières ont évacué leurs habitations dimanche dans le calme.

Les pays riverains du Pacifique sont extrêmement sensibles aux risques de tsunami depuis celui du 26 décembre 2004, qui avait fait plus de 220 000 morts dans l'océan Indien.