Un ancien haut responsable de la police et de la justice de la métropole de Chongqing a commencé à comparaître devant la justice mardi pour ses liens avec la mafia, un dossier qui mèle pouvoir, corruption et sexe et passionne la Chine depuis des mois.

Wen Qiang, 54 ans, ancien directeur du département de la Justice de cette municipalité de 30 millions d'habitants dans le sud-ouest, est poursuivi pour corruption, protection et tolérance de groupes mafieux, possession d'une grande quantité de fonds et de propriétés dont il n'a pu expliquer la provenance, et viol, selon un communiqué du tribunal de Chongqing, où il comparaît. Dans le box des accusés se trouvent également sa femme, Zhou Xiaoya, poursuivie pour corruption, ainsi que trois autres anciens responsables de la police de la ville, qualifiés par les médias chinois d'«hommes de main» de Wen Qiang.

La justice accuse ce dernier d'avoir profité de sa situation au sein de la police et de la justice entre 1996 et 2009 «pour ses intérêts personnels» et d'avoir reçu, seul ou avec sa femme, des biens de sociétés ou de personnes individuelles «pour l'équivalent de plus de 15 millions de yuans» (1,5 million d'euros).

Par ailleurs, il est accusé d'avoir protégé un groupe mafieux, dirigé par sa belle-soeur, Xie Caiping, 46 ans - condamné à 18 ans de prison en novembre -, en échange de 700 000 yuans (70 000 euros).

Enfin, Wen Qiang, petit homme à la bouille ronde portant des lunettes, n'a pu expliquer l'origine de biens d'un montant de plus de 10 millions de yuans, selon le communiqué.

Selon le site Internet du Nanfang Daily, lors de l'audience de mardi, Wen Qiang a nié toute corruption, expliquant avoir reçu des cadeaux pour son anniversaire ou pour les fêtes de fin d'année.

«Ces gens ne m'ont fait aucune demande et je n'ai pas profité de ma position pour leur offrir des avantages», a-t-il dit, selon la même source.

Le procès doit durer cinq jours.

Selon les médias chinois, le dernier jour du procès se tiendra à huis clos car le tribunal se penchera sur l'accusation de viol d'une étudiante et la famille n'a pas souhaité la publicité des débats.

Depuis des mois, l'affaire est suivie avec grand intérêt par le pays tout entier et les médias se sont régalés, les principaux portails Internet consacrant des sections spéciales à l'affaire avec moult détails.

Pour le procès de Wen Qiang, les représentants de plus de 70 médias chinois ont été accrédités.

Plusieurs accusés ont déjà été condamnés à mort depuis le lancement en juin de l'opération «mains propres» à Chongqing, sous l'égide du Premier secrétaire du Parti, Bo Xilai, ancien ministre du Commerce et fils d'un révolutionnaire historique.

Certains analystes estiment que cette affaire sert ses ambitions nationales.

Les médias chinois en ont en effet largement rendu compte, une manière aussi pour les autorités centrales de chercher à persuader le public de leur volonté de lutter contre la corruption.

Depuis plusieurs années, le gouvernement a fait de cette lutte une priorité, estimant que ce fléau pouvait menacer la survie même du Parti communiste au pouvoir, en absence de contre-pouvoirs.

Mardi, sur l'internet, de nombreux commentateurs ne se privaient pas de critiquer le régime dans son ensemble.

«Derrière Wen Qiang, il y a certainement des cadres plus hauts placés, des protections plus puissantes», a affirmé un internaute dans un forum de discussions sur Baidu.com, l'un des principaux portails.