L'opposante birmane Aung San Suu Kyi et l'Américain John Yettaw qui s'était invité chez elle en mai dernier, enfreignant ainsi la loi selon le régime militaire, vont faire appel de leur condamnation, ont annoncé mercredi leurs avocats.

Le verdict de 18 mois supplémentaires d'assignation à résidence, prononcé mardi à l'encontre de la lauréate du Prix Nobel de la paix, continue d'alimenter un déluge de critiques à travers le monde mais, à New York, les quinze pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU se sont séparés sans trouver d'accord sur une déclaration commune. La Chine, principale alliée de la Birmanie, a appelé mercredi la communauté internationale à «respecter totalement la souveraineté de la justice birmane».

L'assignation à résidence de Mme Suu Kyi a été prorogée de 18 mois supplémentaires sur ordre du numéro un de la junte, le généralissime Than Shwe, qui a atténué une peine initiale de trois ans de réclusion et de travaux forcés, annoncée plus tôt par un tribunal spécial siégeant dans une prison.

Mme Suu Kyi a été reconduite dans sa demeure délabrée de Rangoon et, mercredi, la police et d'autres agents de sécurité bloquaient l'avenue menant au domicile de la figure de proue de l'opposition, selon des témoins.

De son côté, M. Yettaw, à l'origine de la mise en accusation de Mme Suu Kyi, a été condamné à des peines de sept ans de prison et de travaux forcés et, selon son avocat, l'Américain reste «très calme» et «espère la meilleure» issue possible.

Nyan Win, avocat de Mme Suu Kyi et porte-parole de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), a déclaré à l'AFP que l'équipe de défense de «La Dame» de Rangoun n'était «pas satisfaite» du jugement.

«Nous pensons que ce jugement est totalement contraire à la loi», a dit Nyan Win, affirmant avoir reçu des indications de Mme Suu Kyi en vue de faire appel de la condamnation dès mercredi si l'équipe de défense reçoit rapidement une copie du jugement.

Mme Suu Kyi, 64 ans, a été privée de liberté pendant 14 des 20 dernières années. L'opposition birmane est convaincue que sa nouvelle condamnation vise à écarter Mme Suu Kyi du paysage politique avant les élections controversées promises par la junte pour 2010.

De son côté, Khin Maung Oo, avocat de M. Yettaw -ce mormon de 54 ans qui a bizarrement réussi à nager jusqu'au domicile de l'opposante-, a également annoncé son intention de faire appel, «étape par étape», de la sévère condamnation visant son client.

Si nécessaire, a-t-il dit, «nous écrirons» à Than Shwe «pour que M. Yettaw soit expulsé» de Birmanie.

Le président américain Barack Obama s'est «joint à la communauté internationale pour appeler à la libération immédiate et sans conditions d'Aung San Suu Kyi». Il s'est également inquiété du sort réservé à M. Yettaw.

La Thaïlande, en sa qualité de présidente en exercice de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (Asean), a exprimé sa «profonde déception» au lendemain du verdict. La Birmanie est l'un des dix pays membres de l'Asean.

Mercredi, dans un commentaire, le quotidien officiel de la junte, The New Light of Myanmar, s'est insurgé contre les étrangers qui «s'ingèrent dans les affaires intérieures d'autres pays».

Le journal a estimé que Than Shwe avait fait preuve d'une «grande considération» à l'égard de Mme Suu Kyi en commuant sa peine de prison en résidence surveillée. Ce faisant, a ajouté le quotidien, il a «créé de bonnes opportunités pour l'avenir du pays».