Une flambée de violence a fait trois morts, chinois de souche, et plus de 20 blessés dimanche à Urumqi, capitale du Xinjiang, une région à population majoritairement musulmane du nord-ouest de la Chine, a annoncé l'agence Chine Nouvelle.

Ces troubles sont les plus graves depuis plus d'un an au Xinjiang qui, aux confins de l'Asie centrale, compte environ 8,3 millions de Ouïghours, dont certains dénoncent la répression politique et religieuse menée par Pékin sous couvert de lutte contre le terrorisme.

«Trois personnes ordinaires de l'ethnie han ont été tuées», a annoncé l'agence officielle, citant des sources du gouvernement de la Région autonome du Xinjiang.

Plus de vingt personnes ont été blessées et de nombreux véhicules ont été incendiés, a ajouté Chine Nouvelle.

«Le gouvernement régional n'a pas dit combien de personnes étaient impliquées, mais a expliqué qu'elles s'étaient illégalement retrouvées dans plusieurs quartiers du centre et avaient battu (des gens), cassé, pillé et incendié», explique l'agence qui ne précise par leur ethnie.

«Le gouvernement a envoyé la police pour disperser la foule et arrêter certains émeutiers, le nombre exact de personnes arrêtées n'a pas été divulgué», ajoute Chine Nouvelle.

Les autorités régionales chinoises ont accusé le Congrès mondial ouïgour, dirigé par Rebiya Kadeer qui vit en exil aux Etats-Unis, d'avoir fomenté les troubles à Urumqi, selon Chine Nouvelle qui ajoute ne pas savoir combien de personnes étaient impliquées dans ces heurts.

Un responsable de l'Association des Ouïghours américains, Alim Seytoff, interrogé dans son exil aux Etats-Unis par l'AFP a déclaré que «plus de trois personnes ont été tuées, mais nous ne savons pas combien. Des centaines d'autres ont été blessées».

«De jeunes Ouïghours sont descendus pacifiquement dans les rues mais plus de mille policiers chinois armés» ont réprimé la manifestation, a-t-il ajouté.

«On nous a dit qu'ils (les policiers) avaient commencé à tirer sans distinction» dans la foule, a-t-il expliqué.

Ces violences antichinoises ne sont pas sans rappeler les émeutes du Tibet de mars 2008 quand des Tibétains s'en étaient violemment pris à des chinois de souche (Han) à Lhassa, la capitale du Tibet, faisant 21 morts, selon Pékin.

Des militants de la cause ouïghoure à l'étranger et une habitante jointe par l'AFP à Urumqi ont fait état de plusieurs milliers de manifestants dans les rues.

«A partir de 21h00 ce soir (9h00 HAE), entre 2000 et 3000 Ouïghours armés de couteaux et de bâtons ont frappé des gens, cassé des voitures, essayé d'incendier des bus et cassé des vitrines du centre-ville», a dit cette habitante, propriétaire d'un bar et d'ethnie Han, comme beaucoup de commerçants au Xinjiang.

La police a rétabli l'ordre, a-t-elle ajouté, précisant que les commerçants de la rue centrale de Daximen, affolés, avaient fermé leurs boutiques.

Des groupes militants ont indiqué de leur côté que des milliers de manifestants ouïghours s'étaient confrontés à la police alors qu'ils protestaient contre la mort récente de deux personnes dans une usine chinoise. Des centaines de manifestants auraient été arrêtés.

Le président de l'Association japonaise des Ouïghours, Ilham Mahmut, a indiqué à l'AFP à Tokyo, sur la base de contacts via l'internet, que quelque 3.000 personnes avaient manifesté et qu'au moins 300 personnes avaient été arrêtées. Il a fait état d'au moins deux morts.

Les troubles ont été déclenchés par un conflit dans une usine de jouets après que des membres de l'ethnie ouïghours ont été accusés d'avoir abusé d'une femme chinoise, a-t-il dit.

Dilxat Raxit, porte-parole du Congrès mondial ouïghour, basé en Allemagne, a pour sa part indiqué à l'AFP que jusqu'à 10.000 personnes avaient manifesté.

Ce genre de violences est rare au Xinjiang où la sécurité est très stricte, Pékin étant confronté dans cette région à une rébellion larvée attribuée à la minorité ouïghoure musulmane et turcophone.

Il y a un mois, la Chine avait annoncé avoir démantelé sept cellules terroristes depuis le début de l'année dans cette région, une information sur laquelle la dissidente ouïghoure en exil Rebiya Kadeer avait invité la communauté internationale à se montrer «sceptique».