Pékin a rejeté jeudi les «ingérences» dans ses affaires intérieures après les condamnations à l'étranger de l'arrestation du dissident chinois Liu Xiaobo, militant de longue date pour la démocratisation.

«La gestion de ce cas est entièrement une affaire intérieure de la justice chinoise, les étrangers doivent respecter sa souveraineté», a déclaré dans un communiqué à l'AFP le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Qin Gang.

«Nous nous opposons fermement à ce que quiconque, sous quelque forme que ce soit, s'ingère dans les affaires intérieures chinoises par des actes et paroles erronés», a ajouté le porte-parole, qui réagissait à des propos de Nancy Pelosi.

La présidente de la Chambre des représentants américaine a estimé que l'arrestation de Liu Xiaobo méritait «une condamnation absolue».

«La Chine est un pays de droit, la justice gère ce cas de manière indépendante», a rétorqué M. Qin.

Militant inlassable d'une démocratisation en Chine, Liu, 53 ans, écrivain et ancien professeur d'université, détenu depuis début décembre, a été formellement arrêté mardi pour activités subversives.

Figure de proue du mouvement démocratique de Tiananmen de 1989, il était un des signataires en décembre dernier de la Charte 08 appelant à des réformes démocratiques.

Jeudi, un porte-parole de l'ambassade américaine en Chine a indiqué pour sa part que les États-Unis étaient «profondément préoccupés» par les informations faisant état de l'arrestation du dissident chinois.

«Nous appelons le gouvernement chinois à relâcher M. Liu et à respecter les droits de tous les citoyens chinois qui expriment pacifiquement leur désir de libertés internationalement reconnues», a dit à l'AFP Richard Buangan.

Mercredi, la France avait également fait part de sa préoccupation.

«La France est attachée à la défense des droits de l'Homme en Chine comme partout dans le monde. La liberté d'expression en est un élément fondamental qui doit être pleinement respecté. Cette question fait partie du dialogue entre la France et la Chine ainsi qu'entre l'Union européenne et la Chine», a déclaré le porte-parole adjoint du ministère des Affaires étrangères, Frédéric Desagneaux.

Plusieurs organisations des droits de l'Homme sont également montées au créneau.

L'arrestation «reflète un durcissement du climat politique en Chine», a jugé Human Rights Watch.

Après l'interpellation de M. Liu, le 8 décembre, survenue en même temps que celle de plusieurs militants qui s'apprêtaient à célébrer le 60e anniversaire de la déclaration des droits de l'Homme, les États-Unis, l'Union européenne et des intellectuels tels le Britannique Salman Rushdie ou l'Italien Umberto Eco avaient appelé à sa libération.

Détenu plus de six mois sans raison officielle, il a finalement été formellement «arrêté mardi pour des activités telles que la propagation de rumeurs et la diffamation du gouvernement, visant à la subversion et au renversement du système socialiste».

Une telle accusation pourrait lui valoir jusqu'à 15 ans de prison, selon son avocat Mo Shaoping.

Exclu de l'université, Liu a déjà passé plus d'un an et demi en prison sans jamais avoir été condamné après la répression en juin 1989 des manifestations en faveur de la démocratie, puis trois ans dans un camp de rééducation «par le travail» de 1996 à 1999, pour avoir réclamé une réforme politique et la libération des anciens manifestants de Tiananmen.