Le procès des attentats de Mumbai (ex-Bombay) fin 2008 a vraiment commencé vendredi lorsque l'accusé pakistanais, seul survivant du commando islamiste, est revenu sur ses aveux en affirmant avoir été torturé, tandis que l'accusation a fustigé une «culture du terrorisme» au Pakistan.

Ce procès hors norme, cinq mois après les attaques contre la capitale économique indienne du 26 au 29 novembre (174 tués, dont neuf des dix assaillants), doit déterminer la culpabilité du Pakistanais Mohammad Ajmal Amir Iman, alias «Kasab», accusé d'avoir perpétré un carnage dans la gare de la ville.

M. Iman, 21 ans, est inculpé «d'actes de guerre» contre l'Inde, de «meurtres et de tentatives de meurtres et de violation de la législation sur les armes et les explosifs».

Il encourt la peine de mort pour ce que la presse a surnommé le «11-Septembre de l'Inde».

Mais le jeune homme «plaidera non coupable», a affirmé son avocat Maître Abbas Kazmi, à la sortie d'audience du tribunal spécial de Mumbai construit au coeur d'une prison.

D'après son défenseur, le prévenu a fait des aveux «soustraits de manière coercitive et par la force» devant un magistrat pendant sa détention préventive.

«Cela n'était pas une confession volontaire» et M. Iman «a été physiquement torturé», a martelé Me Kazmi.

En conséquence et «conformément à ses instructions, une demande de rétractation de ses présumés aveux a été déposée», a conclu l'avocat.

Auparavant, au cours de l'audience à laquelle assistait un journaliste de l'AFP, Me Kazmi a assuré que M. Iman était «âgé de moins de 18 ans» et réclamé le renvoi de l'affaire devant un tribunal pour enfants.

L'accusation, en la personne du procureur général Ujwal Nikam, a rétorqué que le prévenu avait plusieurs fois attesté «avoir 21 ans».

Alors, le juge M. L. Tahiliyani a demandé à M. Iman de se lever dans le box: «Quand on regarde l'accusé numéro 1, il n'a pas vraiment l'air d'avoir moins de 17 ans», s'est amusé le magistrat.

«Cette requête futile vise à retarder le procès», a-t-il affirmé.

Déjà, l'ouverture des débats avait été chaotique mercredi lorsque le juge avait récusé l'avocate de la défense, avant de désigner Me Kazmi le lendemain.

Pour cette véritable première journée, le procureur Nikam s'en est violemment pris au Pakistan, au coeur de l'enquête lancée par l'Inde depuis novembre.

Pour l'accusation, M. Iman fait partie d'un complot «méticuleusement préparé et impitoyablement exécuté» depuis le Pakistan voisin.

«Toutes les personnes accusées, y compris celles recherchées ou décédées, sont le produit d'une culture stratégique du terrorisme», a déclaré M. Nikam.

«Cette culture terroriste a pénétré très profondément au Pakistan, par le fait d'organisations terroristes comme le Lashkar-e-Taïba (LeT). C'est institutionnalisé là bas, fermement enraciné (...) Le Pakistan est de fait devenu un berceau du terrorisme», a dénoncé le procureur.

L'Inde, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne imputent les attentats de Mumbai au LeT, un groupe islamiste armé clandestin pakistanais, actif au Cachemire. New Delhi dénonce en outre la complicité de services de renseignements militaires pakistanais (Inter-services intelligence, ISI).

Le LeT et Islamabad ont nié.

Le Pakistan a admis que le complot avait été «en partie» ourdi sur son territoire, preuve, selon l'Inde, que son «frère ennemi» est bien «l'épicentre du terrorisme mondial».

Le procureur Nikam a d'ailleurs dit disposer «de preuves suffisantes pour conclure que cette conspiration criminelle a été tramée au Pakistan» par le LeT et des «officines», en allusion à l'ISI.