Le procès à Mumbai du seul survivant du commando islamiste qui avait attaqué la capitale économique indienne en novembre 2008 devrait reprendre jeudi, après un faux départ chaotique mercredi au moment où l'Inde s'apprêtait à juger son «11 septembre».

Présidant un tribunal spécial ultra-sécurisé --au coeur d'une prison de Mumbai-- le juge M.L. Tahaliyani a repoussé d'une journée l'ouverture du procès du Pakistanais Mohammed Ajmal Amir Iman, alias «Kasab», en récusant son avocate et en refusant de la remplacer par un défenseur de nationalité pakistanaise.

   «Nous devons donner à « Kasab » un procès juste et équitable et il est nécessaire de désigner un avocat capable de gérer correctement une affaire d'une telle nature», a déclaré le magistrat.

   «Le Pakistan peut vous aider à trouver un avocat, mais il devra être originaire d'ici (en Inde), a-t-il ajouté, en réponse à une requête du prévenu qui sera toutefois transmise, pour la forme, par New Delhi à Islamabad.

   En excluant du prétoire l'avocate indienne du «suspect numéro 1», le président du tribunal a invoqué un conflit d'intérêt «inapproprié»: la juriste serait liée à un témoin de l'accusation.

   Me Waghmare avait accepté de défendre M. Iman, en dépit de pressions et menaces d'extrémistes hindous et du boycottage par le barreau de Mumbai.

   Mercredi, l'accusé âgé de 21 ans est très brièvement apparu dans le prétoire.

   Un journaliste de l'AFP l'a trouvé désarçonné par les règles de procédure pénale énoncées en anglais et en hindi, une langue pourtant proche de l'ourdou parlé au Pakistan.

   Il est en détention préventive en Inde depuis les attentats de Mumbai perpétrés du 26 au 29 novembre (174 tués, dont neuf des dix assaillants).

   Arrêté après avoir commis un carnage dans la gare de la mégapole, M. Iman est inculpé pour «actes de guerre contre le pays», meurtres et tentatives de meurtres et violation de la législation sur les armes et les explosifs.

   Il encourt la peine de mort.

   Les auteurs du «11-Septembre indien», comme l'a surnommé la presse, avaient «l'intention manifeste de déstabiliser l'Inde, de mener une guerre contre le pays, de terroriser ses citoyens, de provoquer des pertes financières et de lancer un avertissement à d'autres nations», détaille l'acte d'accusation.

   L'Inde, les États-Unis et la Grande-Bretagne imputent ces attaques au Lashkar-e-Taïba (LeT), un groupe islamiste armé clandestin pakistanais, actif au Cachemire. New Delhi dénonce en outre la complicité de services de renseignements militaires pakistanais (Inter-services intelligence, ISI).

   Le LeT et Islamabad ont nié, mais le Pakistan a admis que le complot avait été «en partie» ourdi sur son sol.

   Même si l'Inde accuse inlassablement son «frère ennemi», elle poursuit aussi en justice deux Indiens islamistes --Fahim Ansari, 35 ans, et Sabauddin Ahmed, 24 ans-- pour avoir apporté leur soutien logistique au commando avant les attaques.

   Le tribunal spécial dans la prison Arthur Road, qui avait servi en 2007 pour le procès des attentats de Mumbai du 12 mars 1993 (257 morts), est sous sécurité maximale, dans un quartier totalement bouclé où vivent 25 000 personnes.

   Des chaînes d'acier ont été déroulées tout autour du bâtiment, protégé par des centaines de policiers et soldats portant gilets pare-balles, treillis militaires et armes automatiques.

   La circulation sera interdite autour de la prison pendant les six mois d'audiences, au cours desquelles 2000 témoins devraient défiler.

   Un tunnel blindé a même été construit entre le tribunal et la cellule de M. Iman. Celui-ci est à l'isolement, séparé des 3000 détenus, parmi lesquels des figures de la pègre de Mumbai.