La Cour suprême du Pakistan a suspendu mardi un verdict qui excluait de la vie publique le principal chef de l'opposition Nawaz Sharif, en raison d'anciennes condamnations pénales, nouvelle étape vers un apaisement des tensions politiques des dernières semaines.

Le verdict rendu le 25 février contre Nawaz Sharif et contre son frère Shahbaz, alors chef du gouvernement du Pendjab, la province la plus peuplée du pays, avait brusquement amplifié un mouvement de contestation en faveur de l'indépendance de la justice qui couvait depuis des mois.

La crise avait tourné au duel entre le chef de l'Etat, Asif Ali Zardari, et Nawaz Sharif, rivaux de longue date, à la tête des deux puissants clans qui polarisent la vie politique du Pakistan depuis plusieurs décennies.

Elle n'avait été désamorcée à la mi-mars que sous intense pression des Etats-Unis, inquiets d'un risque de déstabilisation du Pakistan, allié de Washington dans la lutte anti-terroriste, et de l'armée.

Parmi les mesures d'apaisement alors annoncées, le gouvernement avait indiqué qu'il ferait appel du verdict.

«La Cour suprême a suspendu la décision du 25 février», a annoncé mardi Syed Zafar Ali Shah, avocat et membre de la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N) de Nawaz Sharif.

Premier ministre à deux reprises dans les années 90, Nawaz Sharif est donc de nouveau autorisé à se présenter à des élections.

Son frère Shahbaz retrouve automatiquement ses fonctions de chef du gouvernement du Pendjab, la province la plus influente dans la vie politique du pays puisqu'elle contrôle 60 pour cent des sièges du Parlement fédéral.

Le verdict est suspendu le temps que la Cour suprême, la plus haute instance judiciaire du pays, réexamine le dossier des frères Sharif.

«Merci à Allah, notre demande était juste. Aujourd'hui une nouvelle justice a vu le jour au Pakistan», a déclaré Shahbaz Sharif à la presse à Lahore, la capitale du Pendjab, tout en promettant de collaborer à l'avenir avec le Parti du Peuple Pakistanais (PPP) du président Zardari.

Le porte-parole de la présidence, Farhatullah Babar, a souhaité que «le rétablissement du gouvernement du Pendjab pousse plus loin le processus de réconciliation».

Furieux du verdict du 25 février, les frères Sharif avaient appelé au soulèvement populaire.

Leurs partisans s'étaient joints au mouvement de contestation mené par les avocats et partis d'opposition pour réclamer le retour de juges destitués en 2007 par le régime militaire, dont Iftikhar Chaudhry, l'ancien président de la Cour suprême.

Ce mouvement avait été désamorcé le 16 mars lorsque le gouvernement avait accepté de réintégrer les magistrats.

Le verdict du 25 février confirmait une précédente décision d'un tribunal qui avait prononcé en juin 2008 la déchéance politique de Nawaz Sharif, chassé du pouvoir par Pervez Musharraf en 1999.

Il avait été condamné pour le «détournement» d'un avion de ligne pakistanais transportant le général Musharraf, de retour d'un voyage à l'étranger, le 12 octobre 1999, jour du coup d'Etat. Il lui avait refusé le droit d'atterrir, mais l'avion avait fini par se poser et Pervez Musharraf s'était emparé du pouvoir.

Shahbaz Sharif, acquitté en mars 2008 dans une affaire d'exécutions extrajudiciaires, avait été déchu pour dettes bancaires et pour avoir ridiculisé la justice.