Au moins 30 personnes ont été tuées vendredi dans le nord-ouest du Pakistan dans un nouvel attentat suicide, visant les funérailles d'un leader chiite assassiné, dans un bastion des talibans proches d'Al-Qaïda.

Cet attentat, même s'il est lié aux violences entre communautés sunnite et chiite, porte à plus de 1.600 le nombre de tués dans des attentats depuis l'été 2007 à travers le Pakistan, quand les talibans et Oussama ben Laden ont déclaré le jihad, la «guerre sainte» à Islamabad, allié-clé des Etats-Unis dans leur «guerre contre le terrorisme».

Il survient au moment où la communauté internationale s'émeut du fait que le Pakistan, seule puissance militaire nucléaire du monde musulman, tente de négocier la paix avec les fondamentalistes dans la vallée de Swat, à moins de 120 km de la capitale, en échange de l'application de la charia, la loi islamique.

L'attentat s'est produit devant une mosquée chiite à Dera Ismaïl Khan, une ville de la Province de la Frontière du Nord-Ouest (NWFP) où les chiites sont souvent la cible de violences perpétrées par des groupes de talibans pakistanais sunnites.

«Trente personnes ont été tuées et 65 sont blessées», a déclaré à l'AFP un officier de police, Saadullah Khan.

La procession s'éloignait de la mosquée quand Gulzar Hussain, 26 ans, a juste eu le temps d'apercevoir un homme se précipiter au coeur de la foule, avant d'être terrassé par l'explosion. «Tout ce que j'ai vu, en recouvrant mes esprits, ce sont des lambeaux de chair éparpillés au milieu d'une mare de sang», raconte-t-il au téléphone, ajoutant: «J'ai vu un enfant hurler de douleur».

Alors que l'attentat a provoqué un début d'émeute, «un couvre-feu a été instauré et l'armée s'est déployée», a indiqué à l'AFP le chef du district, Syed Mohsin Shah.

L'attentat visait une procession pour les funérailles de Sher Zaman, un religieux chiite assassiné par des hommes à moto jeudi.

Les chiites représentent moins de 20% des quelque 168 millions d'habitants de la République Islamique du Pakistan, le reste appartenant à la communauté sunnite de l'islam.

Le nord-ouest du Pakistan, en particulier les zones tribales qui longent la frontière avec l'Afghanistan, abrite des bastions des talibans pakistanais alliés à des talibans afghans et à des combattants étrangers du réseau Al-Qaïda.

L'armée a intensifié ces derniers mois ses offensives contre les talibans dans les zones tribales, mais sans parvenir à occuper durablement le terrain.

Pour tenter d'enrayer la progression des talibans, le gouvernement provincial de NWFP négocie, depuis le début de la semaine, un accord de paix très controversé avec les talibans dans la magnifique vallée himalayenne de Swat, une région prisée des touristes avant que les combattants fondamentalistes ne s'en emparent à l'été 2007. Les autorités provinciales y ont promis l'application de la charia si les talibans cessent de se battre.

Embarrassé, le gouvernement pakistanais, qui essuie de nombreuses critiques et avertissements des Etats-Unis, d'Europe et de l'Otan en particulier dans ce dossier, a conditionné cet accord à un abandon des armes par les talibans, ce qui semble peu probable.