Le dalaï lama, chef spirituel des bouddhistes tibétains, craint des «débordements» et une répression accrue au Tibet, où, selon lui, la situation est «très tendue» à l'approche du 50e anniversaire du soulèvement au Tibet, le 10 mars 1959.

«Aujourd'hui, il y a trop de colère», a dit le dalaï lama lors d'un entretien avec des journalistes mercredi à Baden-Baden (ouest de l'Allemagne).

«La situation est très tendue, des débordements peuvent arriver à tout moment», a-t-il dit.

«Voilà mon inquiétude» car «avec plus de soulèvement, il y aura plus de répression», «tout cela est très triste», a-t-il ajouté. «Dès que les gens sont arrêtés, ils sont torturés et parfois tués», a affirmé le dalaï lama.

La situation est tellement tendue que «les militaires chinois à Lhassa ont en permanence le doigt sur la gâchette» de leur arme, a-t-il dit.

«Du fait que les exécutions publiques sont difficiles, ils se servent de la torture contre les Tibétains emprisonnés», a-t-il expliqué.

Le dalaï lama, 73 ans, a expliqué qu'il tenait ses informations de groupes de Tibétains qui viennent régulièrement le voir dans le nord de l'Inde après avoir quitté le Tibet.

Le chef spirituel des bouddhistes tibétains, est arrivé mardi à Baden-Baden où il a reçu le Prix allemand des médias, décerné par un jury de journalistes et d'éditeurs allemands. Selon lui la politique chinoise à l'égard du Tibet s'était notablement durcie ces dernières années, y compris dans le domaine clé de l'éducation.

«Dans bien des endroits, les écoles tibétaines, surtout celles financées par des fonds privés, ont été fermées car elles pouvaient plus librement enseigner l'histoire du Tibet», a-t-il dit.

«Les Chinois suppriment systématiquement l'identité tibétaine», a-t-il dit.

Pour le dalaï lama, la violence ne mène à rien de positif. C'est ainsi que les journées d'émeutes en mars 2008 ont suscité une campagne de répression très sévère, a-t-il souligné.

Dans leur grande majorité, les Tibétains demeurent adeptes de la non-violence et adhèrent à la voie médiane prônée par lui, c'est-à-dire non pas l'indépendance complète du Tibet mais une véritable autonomie, a-t-il, expliqué.

Quand aux autres qui, à l'intérieur du Tibet, souhaitent recourir à la violence contre la présence chinoise, «je comprends leur opinion désespérée, mais il n'y a que la non-violence» qui soit viable, a encore souligné le dalaï lama.

«Aussi longtemps qu'il y aura une présence militaire chinoise (au Tibet) il y aura de la tension», a-t-il déclaré.

Le responsable tibétain a encore expliqué que les discussions entre ses représentants et les autorités chinoises qui se tiennent régulièrement n'aboutissaient à aucun résultat concret. «Le problème est que les Chinois refusent que nous mettions par écrit le contenu de ces discussions».

Pour le dalaï lama il est important de dire aux Chinois que «la question tibétaine ne va pas s'effacer, sauf si une solution acceptable pour les deux parties est trouvée». Or «l'intérêt pour la culture tibétaine et les droits de l'Homme au Tibet est maintenant répandu partout dans le monde», s'est-il félicité.

Après sa visite à Baden-Baden, le dalaï lama doit retourner à Dharamsala, dans le nord de l'Inde, son lieu de résidence depuis sa fuite en exil le 17 mars 1959 en raison de la répression par la Chine du soulèvement tibétain à Lhassa.