Le Sri Lanka a exhorté lundi quelque 200 000 civils tamouls, pris au piège des combats dans le nord-est de l'île entre l'armée et la rébellion tamoule à quitter la zone du conflit, au lendemain de la mort de neuf personnes dans le bombardement d'un hôpital.

Dans une ambiance très lourde - un ministre a menacé d'expulser diplomates, organisations humanitaires ou journalistes perçus comme favorables aux Tigres tamouls - les militaires et les insurgés se livrent une bataille acharnée à huis clos sur un triangle de 300 km2 encore aux mains des séparatistes.

Dans ce département de Mullaittivu, «le gouvernement appelle tous les civils à entrer dès que possible dans une zone de +sécurité+», c'est-à-dire en territoire gouvernemental, car les autorités «ne pourront pas être tenues pour responsables de la sécurité des gens habitant à proximité des rebelles des Tigres de libération de l'Eelam tamoul» (LTTE).

Dimanche, l'hôpital de Puthukkudiriruppu avait été bombardé à deux reprises, a révélé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en se déclarant «choqué».

Au moins neuf personnes ont péri et 15 ont été blessées.

Sur place «la situation est très tendue», a déclaré à l'AFP par téléphone T. Varatharajah, directeur régional des services de santé. Les locaux des infirmiers, le dortoir des femmes, la cuisine et la morgue ont été endommagés, a-t-il précisé.

«Les blessés et les malades, le personnel médical et les installations médicales sont protégés par le droit international humanitaire. Ils ne doivent en aucune circonstance faire l'objet d'attaques directes», a protesté Paul Castella, chef de la mission du CICR à Colombo, sans montrer du doigt les Tigres ou l'armée.

Celle-ci a nié avoir bombardé l'hôpital et accusé les LTTE de l'avoir fait pour la «discréditer».

«Nous connaissons l'emplacement précis de l'hôpital. Nous ne le frapperons pas et sommes disposés à organiser à tout moment l'évacuation en toute sécurité des civils», a assuré le porte-parole de l'armée, le général Udaya Nanayakkara.

Le dispensaire visé abrite plus de 500 patients, parmi lesquels certains doivent être acheminés vers un établissement mieux équipé, plus au sud, en zone gouvernementale.

Les Nations unies et la Croix-Rouge avaient réussi jeudi à évacuer 226 blessés graves, dont 51 enfants, d'un hôpital de Mullaittivu après avoir âprement négocié avec les Tigres.

Depuis une semaine, la communauté internationale et des organisations d'aide et de défense des droits de l'Homme somment Colombo et la guérilla d'épargner les centaines de milliers de civils tamouls coincés à Mullaittivu.

Des centaines d'habitants y ont déjà été tués en janvier.

L'ONU estime qu'ils sont 250 000 à survivre dans cette région. Le Sri Lanka rétorque qu'ils sont deux fois moins nombreux.

Le gouvernement est en tout cas resté sourd aux appels internationaux à un cessez-le-feu. Il avait simplement donné aux Tigres jusqu'à samedi pour laisser partir les résidents de Mullaittivu.

Après quoi, il a lancé son assaut final pour «libérer» entièrement l'ex-Ceylan, ancienne colonie britannique meurtrie par 37 années de conflit entre la majorité cinghalaise bouddhiste et la minorité tamoule hindouiste, au prix de 70 000 morts.

Des avions ont pilonné dimanche et lundi les dernières positions des Tigres, qui ont répliqué par des tirs d'artillerie: 46 combattants des LTTE ont été tués, si l'on en croit le ministère de la Défense, qui interdit aux ONG et à la presse d'accéder à Mullaittivu, ni même à un camp de réfugiés tamouls plus au sud, à Vavuniya.