Des dizaines de civils ont été tués depuis dimanche dans le nord du Sri Lanka lors des combats entre l'armée gouvernementale et les rebelles séparatistes tamouls, a annoncé lundi l'ONU, au moment où la guérilla accumule les défaites militaires.

Après 37 ans de conflit, le gouvernement de Colombo a affirmé dans la journée que son armée traquait 2.000 combattants des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE) dans leurs derniers bastions de la jungle septentrionale, au lendemain de la chute de l'unique ville qu'ils contrôlaient encore, Mullaittivu.

Mais au moins dix civils ont été tués dans la matinée dans une enclave pourtant déclarée «zone de sécurité» par l'armée, a dénoncé le porte-parole local des Nations unies, Gordon Weiss.

«A l'intérieur de la "zone de sécurité" des bombardements sur une route ont tué au moins 20 personnes au cours du week-end. Des membres de notre personnel ont été témoins des scènes (mais) nous ne savons pas d'où venaient les tirs», a-t-il ajouté.

Cette enclave avait été ouverte par l'armée la semaine dernière, en territoire rebelle, pour permettre officiellement aux 150.000 à 300.000 civils coincés autour de Mullaittivu de ne pas être pris entre deux feux.

Ce département côtier de Mullaittivu, tenu par les Tigres depuis 1996, abrite une partie de leurs infrastructures militaires. Ils sont dorénavant confinés dans la jungle sur un territoire de 20 km de long sur 15 km de large.

Lundi, des hélicoptères ont pilonné leurs positions dans la forêt, si l'on en croit un communiqué militaire, quasiment la seule source d'informations sur le terrain de cette guerre sans images.

Avant les déclarations de l'ONU, le site internet Tamil.net, qui relaie les positions des Tigres, avait affirmé que «plus de 100 civils avaient été tués» par les bombardements de l'armée depuis dimanche dans cette «zone de sécurité».

«Nous n'avons ni visé, ni bombardé de régions abritant des civils sur le front nord», a démenti le porte-parole de l'armée, Udaya Nanayakkara, fustigeant la «propagande» de l'ennemi pour masquer ses revers militaires.

De fait, la chute de Mullaittivu est une défaite cuisante pour les LTTE, qui ont déjà perdu le 2 janvier leur «capitale» politique, Kilinochchi, dans le nord, après avoir été éjectés de leurs bastions de l'est à l'été 2007.

Depuis un mois, Colombo est lancé dans ce qu'il présente comme son offensive finale contre les Tigres tamouls et le démantèlement total de leur «mini-Etat» dans le nord. Début janvier, le président nationaliste Mahinda Rajapakse les avait sommés de déposer les armes, sous peine d'être écrasés cette année.

Pour autant, l'avancée des troupes sri-lankaises ne signe pas la mort des LTTE.

Défaits sur le terrain militaire, ils pourraient multiplier les actions de guérilla ou les attentats suicide comme c'était le cas au début du plus vieux conflit en cours en Asie.

Depuis 1972, les Tigres tamouls, hindouistes, se battent pour l'indépendance du nord et de l'est de l'ex-Ceylan, une île située au sud de l'Inde, peuplée de 20 millions d'habitants, dont 75% de Cinghalais bouddhistes, et qui fut colonie britannique jusqu'en 1948. Au moins 70.000 personnes ont perdu la vie dans cette guerre civile, dont des milliers depuis le regain des violences fin 2005, dès l'élection de M. Rajapakse.

Mais même si celui-ci accumule les victoires, il sous-estime la puissance de frappe des LTTE: c'est l'une des plus redoutables guérillas au monde, emmenée par son chef Velupillaï Prabhakaran, lequel est introuvable --il aurait fui en Asie du Sud-Est-- et a récemment juré de conserver son fief du nord.