(Séoul) La Corée du Nord a lancé mercredi ce qui a été présenté par Séoul comme un missile balistique, une semaine après la promesse faite par son dirigeant Kim Jong-un d’accélérer le développement de l’arsenal nucléaire du pays.

Ce nouveau test d’armement intervient alors que la Corée du Sud et les États-Unis s’attendent à une reprise par Pyongyang de ses essais nucléaires, interrompus en 2017.

Le régime nord-coréen avait déjà, en mars, rompu un moratoire de cinq ans sur ses essais de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) en lançant un puissant projectile, capable d’atteindre les États-Unis.

L’état-major intérarmées de la Corée du Sud a fait état mercredi dans un communiqué d’un « lancement de missile balistique par la Corée du Nord à 12 h 03 » (3 h 03 GMT), a priori depuis l’aéroport de Sunan, au nord de Pyongyang.

Le projectile a parcouru 470 km et atteint une altitude de 780 km avant de tomber en mer du Japon, a ajouté l’état-major, qualifiant ce tir de « violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU ».

14 tirs depuis janvier

Le ministre japonais de la Défense, Makoto Oniki, a confirmé cette trajectoire et précisé que le missile avait terminé sa course « hors de la zone économique exclusive du Japon ».

« Le lancement répété de missiles balistiques menace la paix et la sécurité de notre nation, de la région et de la communauté internationale », a-t-il déploré.

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a exhorté mercredi « la Corée du Nord à s’en tenir complètement à ses obligations internationales ». « Ce tir […], faisant appel à de la technologie de missile balistique, ne fait qu’accroître les tensions régionales et internationales », a ajouté son porte-parole, Stéphane Dujarric.  

En dépit de sévères sanctions internationales, la Corée du Nord redouble d’efforts ces derniers mois pour moderniser son armée, et a procédé à 14 tirs d’essai depuis janvier.

Lors d’un grand défilé militaire le 25 avril, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a promis de « renforcer et développer les capacités nucléaires de notre nation à un rythme accéléré ».

« Les armes nucléaires, symbole de notre force nationale et au centre de notre puissance militaire, doivent être renforcées en termes de qualité et de portée », a-t-il affirmé.

« Bouée de sauvetage »

Quelques jours plus tard, il a qualifié l’arme nucléaire de « bouée de sauvetage garantissant la sécurité de notre pays », et a menacé de l’utiliser « à titre préventif ».

Les nombreux pourparlers diplomatiques visant à convaincre Pyongyang de renoncer à la bombe atomique sont au point mort depuis l’échec, en 2019, d’une rencontre entre Kim Jong-un et le président américain de l’époque Donald Trump.

« Il y a de fortes chances pour qu’ils aient testé (mercredi) un missile pouvant être équipé d’une ogive nucléaire », a déclaré à l’AFP Ahn Chan-il, un chercheur spécialisé dans les affaires nord-coréennes.

Le nouveau lancement intervient par ailleurs à moins d’une semaine de la prise de fonctions du nouveau président sud-coréen Yoon Suk-yeol, un conservateur qui a promis de se montrer plus ferme à l’égard de son voisin du nord.

Pendant sa campagne électorale, M. Yoon a plaidé pour que les États-Unis renforcent les défenses antimissiles en Corée du Sud, voire y déploient des armes nucléaires tactiques.

Le président américain Joe Biden doit se rendre en Corée du Sud fin mai.  

Washington « très inquiet »

Le porte-parole du Pentagone a dit mercredi être « très inquiet de ces tests et de la nature provocatrice de leur programme de missiles balistiques ». John Kirby a indiqué que les États-Unis avaient invité Pyongyang à revenir à la table des discussions « sans condition préalable » tout en travaillant « au fait d’être prêt pour notre alliance » avec Séoul et Tokyo.

Interrogée mardi sur une mise au vote en mai d’un projet de résolution américain alourdissant les sanctions internationales contre Pyongyang, l’ambassadrice américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield, a répondu que les États-Unis prévoyaient « d’aller de l’avant » ce mois-ci à ce sujet.

Mis en avril sur la table du Conseil de sécurité, le texte, obtenu par l’AFP, prévoit de réduire de quatre millions à deux millions de barils la quantité de pétrole brut que la Corée du Nord serait autorisée à importer chaque année à des fins civiles, et imposerait des restrictions sur de nouvelles exportations nord-coréennes, notamment de combustibles minéraux et d’horloges.

Selon des diplomates, la Chine et la Russie, détentrices d’un droit de veto au Conseil, ont refusé jusqu’à présent de discuter du contenu du projet. Aucune date pour un vote n’a été avancée, a précisé l’un de ces diplomates.  

Le nouveau test de missile « pourrait être un avertissement » pour M. Yoon, a estimé Hong Min, de l’Institut coréen pour l’unification nationale, selon qui Pyongyang n’acceptera jamais la principale condition posée par le nouveau dirigeant sud-coréen pour reprendre les pourparlers de paix, à savoir le renoncement à l’arme nucléaire.

« Cela pourrait aussi être un signal par Pyongyang qu’il n’a d’autre choix que celui de renforcer son arsenal si Séoul et Washington décident de déployer des armements stratégiques au Sud », a ajouté cet expert.

Selon Cheong Seong-chang, spécialiste de la Corée du Nord à l’Institut Sejong, la Corée du Nord « va essayer de tester le plus de missiles possible » afin « d’améliorer les capacités de son arsenal à un rythme rapide ».