Après une sécheresse historique, des incendies de forêt dévastateurs et les pires inondations en 50 ans, l’Australie doit maintenant affronter une invasion de souris, qui menacent les récoltes et l’économie de l’est du pays. À un point tel que le rongeur est maintenant l’ennemi public numéro un. « La seule bonne souris est une souris morte », a d’ailleurs déclaré récemment le vice-premier ministre australien.

Des souris partout

Depuis le mois de mars, l’Australie fait face à l’une des pires invasions de souris de son histoire. Celles-ci dévorent les récoltes des fermiers. Elles entrent dans les maisons et ont même privé temporairement de service des milliers d’abonnés après avoir grugé des fils d’une centrale téléphonique. Les agriculteurs se plaignent de ne pouvoir en venir à bout. Elles se faufilent dans les épiceries, les hôpitaux et elles provoquent même des incendies dans des maisons. « Essayer de les compter, ça serait comme essayer de compter le nombre d’étoiles dans le ciel », a déclaré Steve Henry, chercheur à l’Agence nationale des sciences de l’Australie. Il suffit d’ailleurs de faire une recherche dans Google avec les mots-clés « mouse » (souris) et « Australia » (Australie) pour tomber sur des centaines de vidéos illustrant l’ampleur du phénomène.

PHOTO RICK RYCROFT, ASSOCIATED PRESS

Les souris se reproduisent très rapidement.

Sortir l’artillerie lourde

Le gouvernement a déjà mis sur pied un programme pour contrer l’épidémie : les appâts sont fournis gratuitement pour capturer les rongeurs. Mais l’État de Nouvelle-Galles-du-Sud, dans l’est du pays, a quand même sorti l’artillerie lourde dans l’espoir d’en venir à bout. On a récemment confirmé avoir commandé 5000 litres de bromadiolone, puissant et controversé pesticide. Des experts jugent le produit trop dangereux puisqu’il pourrait s’accumuler dans les sols qui servent à l’agriculture. Le produit est également assez puissant pour empoisonner d’autres animaux reconnus pour se nourrir de souris. De l’autre côté, le groupe de pression NSW Farmers estime que les pertes économiques causées par cette « épidémie » pourraient totaliser 1 milliard de dollars australiens (932 millions CAN). « Il nous faut prendre cette voie parce que nous avons besoin d’un produit très puissant, l’équivalent du napalm, pour venir à bout de ces souris », a tranché le ministre de l’Agriculture de la Nouvelle-Galles-du-Sud, Adam Marshall.

Des invasions récurrentes

Ce n’est pas la première invasion de souris en Australie, un phénomène qui se produit généralement tous les 10 ans, après un épisode de sécheresse suivi de fortes pluies. Or, le pays a été durement frappé par la sécheresse ces dernières années, qui a aussi provoqué d’immenses incendies de forêt. Des pluies diluviennes et des inondations sont venues s’ajouter par la suite. En prime, des changements dans les pratiques agricoles semblent aussi en cause. Alors que les fermiers avaient l’habitude de faire brûler leurs champs avant de semer à nouveau, ils ont plutôt commencé depuis une quinzaine d’années à laisser les anciens plants au sol, pour des considérations environnementales. Or, cette pratique favorise les souris qui trouvent tout simplement plus de nourriture pour proliférer. Par ailleurs, selon l’Agence nationale des sciences, de tels phénomènes sont observés seulement en Chine et en Australie, mais la science n’est pas encore en mesure de fournir des explications convaincantes.

PHOTO JILL GRALOW, REUTERS

Norman Moeris tente de venir à bout des souris sur sa ferme à l’aide de pièges.

Deux souris et c’est parti…

Une seule souris peut donner naissance jusqu’à dix petits toutes les trois semaines. Leur nombre peut donc rapidement exploser si les conditions leur sont favorables. L’espèce montre aussi une grande capacité d’adaptation. Incapables jusqu’à présent de contrôler cette invasion, les autorités espèrent que l’hiver, de mai à octobre en Australie, puisse réduire significativement leur nombre. Mais si elles survivent au froid en plus grand nombre que prévu, leur population pourrait à nouveau exploser au printemps. Selon l’Agence nationale des sciences, il faut compter entre 800 et 1000 souris à l’hectare pour parler d’épidémie. Un hectare équivaut approximativement à un terrain de football.

Au pays des souris

Dans ce pays habitué à vivre avec les souris, on retrouve notamment un site web et une application intitulée Mouse Alert, qui permet de suivre la progression d’une épidémie. De son côté, l’Agence nationale des sciences produit régulièrement des rapports sur la situation et consacre des efforts à la recherche sur la question.