(Hong Kong) Denise Ho, la citoyenne canadienne qui a été arrêtée lors d’un raid contre la presse à Hong Kong, a été relâchée par la police jeudi.

Sur les réseaux sociaux, les comptes officiels associés à la chanteuse populaire qui a grandi à Montréal indiquent qu’elle est « de retour à la maison ».

« Je suis un peu fatiguée, en ce moment, mais je vais bien physiquement et mentalement. Merci pour votre amour » peut-on lire sur sa page Facebook.

Le message précise que la chanteuse et militante prévoyait toujours participer à un concert en ligne dimanche.

« Même dans les moments les plus difficiles, les chanteurs doivent encore chanter jusqu’au dernier souffle », peut-on lire en cantonais.

La ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly a indiqué jeudi sur Twitter que Denise Ho peut compter sur l’appui du Canada et que « notre consulat à Hong Kong est activement engagé et prêt à offrir toute l’étendue des services consulaires ».

Mélanie Joly a également précisé avoir parlé avec Rachael Bedlington, la consule générale du Canada à Hong Kong.

« Le Canada demeure profondément préoccupé par les arrestations des membres de l’équipe de Stand News », a écrit la ministre Joly jeudi.

Elle avait également exprimé ses inquiétudes mercredi, tout comme le député conservateur Michael Chong qui avait pour sa part indiqué que « son arrestation enfreint le Traité sino-britannique de 1984. On ne peut pas fermer les yeux sur les violations du droit international par Pékin. »

Denise Ho a fait ses études secondaires au Collège Jean-de-la-Mennais à La Prairie, en Montérégie, avant d’étudier au Collège Jean-de-Brébeuf, à Montréal. Elle a aussi entrepris des études de design graphique à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) avant de connaître une carrière sur la scène pop à Hong Kong.

Denise Ho, connu sous le nom d’artiste HOCC, est également une militante engagée pour les droits humains.

Dans un article du New Yorker en 2019, elle avait déclaré, à propos d’une de ses chansons intitulée Montréal, que la métropole québécoise lui avait appris « comment être une personne ».

« Mes valeurs, mon sens de l’indépendance, mes principes, mon penchant pour la rébellion, ils ont tous pris racine là ».

Chung Pui-kuen et Patrick Lam, deux anciens éditeurs du site web pro-démocratie Stand News, de Hong Kong, qui a fermé mercredi après la perquisition de la police, ont été formellement inculpés de sédition jeudi et leur remise en liberté provisoire leur a été refusée.

PHOTO VINCENT YU, AP

Patrick Lam a été inculpé de sédition jeudi et sa remise en liberté provisoire lui a été refusée.

Patrick Lam n’était pas présent à sa comparution, car il avait dû être transporté à l’hôpital.

Lors de l’opération policière, un journaliste et sept rédacteurs en chef actuels et anciens et des membres du conseil d’administration du média ont aussi été arrêtés, dont Denise Ho.

Ce raid a été orchestré dans le cadre d’une répression continue de la dissidence dans la ville chinoise semi-autonome.

La cheffe de l’exécutif de Hong Kong, Carrie Lam, a défendu la perquisition en expliquant que dans un contexte de diffusion d’informations, l’incitation à la contestation de l’ordre établi ne pouvait être tolérée.

Pour sa part, le secrétaire d’État américain Anthony Blinken a réclamé des autorités de Hong Kong la libération des personnes arrêtées.

Stand News a déclaré dans un communiqué que son site web et ses réseaux sociaux ne seront plus mis à jour et seront supprimés. Le média a déclaré que tous les employés avaient été licenciés.

Stand News était l’une des dernières voix ouvertement critiques à Hong Kong après la fermeture du journal Apple Daily, qui a fermé après que son éditeur, Jimmy Lai, et les principaux rédacteurs en chef aient été arrêtés et ses avoirs aient été gelés.

Mercredi, les policiers ont également arrêté une septième personne, un ancien rédacteur en chef d’Apple Daily.

Plus de 200 agents ont été impliqués dans la perquisition, a indiqué la police. Ils avaient un mandat pour saisir des documents journalistiques pertinents en vertu d’une loi sur la sécurité nationale promulguée l’année dernière.

Les sept personnes ont été arrêtées en vertu d’une ordonnance sur la criminalité qui date de l’époque où Hong Kong était une colonie britannique avant 1997, date à laquelle elle a été rétrocédée à la Chine. Si ces personnes sont reconnues coupables, elles pourraient encourir jusqu’à deux ans de prison et une amende pouvant aller jusqu’à 5000 dollars de Hong Kong (820 $ CAN).

Tôt mercredi, Stand News a publié sur Facebook une vidéo de policiers au domicile d’un rédacteur en chef adjoint, Ronson Chan. Celui qui est également président de l’Association des journalistes de Hong Kong, a été emmené pour interrogatoire, a confirmé l’organisation dans un communiqué.

Ronson Chan, qui a ensuite été libéré, a déclaré aux médias que la police avait saisi ses appareils électroniques, ses cartes bancaires et sa carte de presse.

Ces arrestations se produisent alors que les autorités répriment la dissidence dans la ville chinoise semi-autonome. La police de Hong Kong avait précédemment fait une descente dans les bureaux de l’ancien journal Apple Daily, saisissant des boîtes de matériel et des disques durs d’ordinateurs pour les aider dans leur enquête et gelant des millions de dollars, ce qui a par la suite forcé le journal à cesser ses activités.

La police a inculpé mardi Jimmy Lai de Apple Daily de sédition, il était déjà emprisonné pour d’autres chefs d’accusation.

« Nous ne ciblons pas les journalistes, nous ne ciblons pas les médias, nous ciblons simplement les infractions à la sécurité nationale », a déclaré Li Kwai-wah, surintendant principal du département de la sécurité nationale de la police. « Si vous ne faites que des reportages, je ne pense pas que ce soit un problème. »

Il a déclaré lors d’une conférence de presse que les personnes arrêtées devaient rendre compte de leurs actes même si elles avaient démissionné de Stand News.

Lorsqu’on lui a demandé quel conseil il avait pour les médias, Li Kwai-wah a répondu : « Ne soyez pas partial. Vous savez bien comment faire un reportage, comment être un journaliste responsable, comment faire un reportage impartial à vos lecteurs. C’est tout ce que je peux vous dire. »

Plus tôt cette année, Stand News a annoncé qu’il suspendrait les abonnements et supprimerait la plupart des articles d’opinion et les chroniques de son site web en raison de la loi sur la sécurité nationale. Six membres du conseil d’administration ont également démissionné de la société.

L’association des journalistes a exhorté le gouvernement de la ville à protéger la liberté de la presse conformément à la mini-constitution de Hong Kong, la Loi fondamentale.

« L’Association des journalistes de Hong Kong est profondément préoccupée par le fait que la police a arrêté à plusieurs reprises de hauts responsables des médias et a fouillé les bureaux d’agences de presse contenant de grandes quantités de matériel journalistique en l’espace d’un an », a-t-elle déclaré dans un communiqué.

Benedict Rogers, cofondateur et PDG de l’organisation non gouvernementale Hong Kong Watch, a déclaré que les arrestations ne sont « rien de moins qu’une attaque totale contre la liberté de la presse à Hong Kong ».

« Quand une presse libre garantie par la loi fondamentale de Hong Kong est qualifiée de “séditieuse”, c’est un symbole de la vitesse à laquelle cette ville internationale autrefois grande et ouverte est devenue un peu plus qu’un État policier », a-t-il déclaré.

Les arrestations de mercredi ont également suivi le retrait de sculptures et d’autres œuvres d’art des campus universitaires la semaine dernière. Les œuvres soutenaient la démocratie et commémoraient les victimes de la répression chinoise contre les manifestants démocrates sur la place Tiananmen de Pékin en 1989.