(Jakarta) L’Indonésie, débordée par une flambée meurtrière sans précédent liée au variant Delta, avec un record de 728 morts en 24 heures, a appelé à l’aide mardi les pays de la région pour approvisionner d’urgence ses hôpitaux en oxygène, au bord de l’effondrement.

Le pays le plus touché d’Asie du Sud-Est a importé de l’oxygène de Singapour pour ses patients en détresse respiratoire, mais cela risque de ne pas être suffisant, alors que le nombre de cas pourrait grimper à plus de 50 000 par jour, a annoncé mardi le gouvernement indonésien.

Les hôpitaux de la capitale Jakarta, durement touchée, affichaient un taux d’occupation de plus de 90 %.  

Incapables de faire face à l’énorme afflux de malades, une douzaine d’hôpitaux de la deuxième ville d’Indonésie, Surabaya, ont dû refuser de nouveaux patients, obligeant des familles désespérées à chercher des bouteilles d’oxygène pour soigner les malades et les mourants à domicile.

Une porte-parole de l’hôpital de Surabaya a fait état d’unités de soins intensifs surchargées et de médecins épuisés.  

« L’hôpital n’a plus de chambres pour les patients qui ont besoin d’appareils respiratoires. Les chambres des unités de soins intensifs sont pleines elles aussi », a déclaré cette responsable sous couvert d’anonymat.  

« Nous sommes débordés. Beaucoup de nos personnels de santé craquent d’épuisement et certains sont également infectés. Nous essayons de trouver des volontaires pour nous aider », a-t-elle ajouté.  

Près de 1000 travailleurs médicaux indonésiens sont morts de la COVID-19, dont plus d’une douzaine qui étaient déjà vaccinés à 100 %, selon l’association médicale indonésienne.

« Scénario du pire »

Dans les grandes villes, des milliers de soldats et de policiers tentent de faire appliquer les nouvelles mesures drastiques contre le virus, espérant voir baisser le nombre record de cas quotidiens.

Le quatrième pays le plus peuplé du monde, avec près de 270 millions d’habitants, a vu son nombre de cas quotidiens plus que quadrupler en moins d’un mois, avec 31 189 nouvelles infections et 728 décès enregistrés mardi au cours des dernières 24 heures.  

Rien qu’à Jakarta, le nombre d’enterrements quotidiens de COVID-19 a été multiplié par 10 depuis le mois de mai, et les employés des cimetières, épuisés, se démènent pour faire face à la situation.

Mardi, le gouvernement a annoncé qu’environ 10 000 concentrateurs d’oxygène - des appareils destinés aux personnes souffrant d’insuffisance respiratoire - devaient être expédiés de Singapour, certains étant arrivés plus tôt par un avion cargo Hercules.

Jakarta est également en pourparlers avec d’autres pays, dont la Chine, pour obtenir de l’aide, a précisé Luhut Binsar Pandjaitan, un membre du gouvernement. « Nous commanderons de l’oxygène à d’autres pays si nous avons le sentiment que les réserves sont insuffisantes. »

Lundi, les autorités avaient ordonné que toutes les réserves d’oxygène disponibles soient envoyées dans les hôpitaux.  

Le ministre Luhut Binsar Pandjaitan a mis en garde contre le « scénario du pire » dans lequel le nombre quotidien de nouvelles contaminations atteindrait les « 50 000, voire 60 000 à 70 000 cas par jour ».

« Mais nous espérons que cela n’arrivera pas ».  

5 % de vaccinés

Les bureaux, les mosquées, les parcs, les centres commerciaux et les restaurants ont été fermés dans toute l’île de Java en vertu des nouvelles mesures de restriction édictées ce week-end.  

Mais les infractions ont été nombreuses. Les autorités de la ville de Semarang, à Java, ont tiré au jet d’eau sur les magasins qui refusaient d’obtempérer.  

Le maire de Surabaya a même ordonné que les contrevenants à la réglementation se voient obligés de visiter le cimetière local, tandis qu’à Malang, certains habitants se sont déguisés en fantômes dans l’espoir d’effrayer les réfractaires, dans un pays où les croyances surnaturelles sont très répandues.

Au total, officiellement, 2,3 millions de personnes ont été contaminées en Indonésie par le coronavirus qui a fait 61 686 morts. Les experts pensent que ces chiffres sont largement en dessous de la réalité, en raison du nombre insuffisant de tests, et du manque de traçage des cas.

L’Indonésie s’est fixé pour objectif de vacciner plus de 180 millions de personnes d’ici le début de l’année prochaine. Mais à ce stade, seulement 5 % de la population a reçu ses deux doses.