Un réfugié qui vivait dans un des camps du Bangladesh où s’entassent depuis plusieurs années des centaines de milliers de Rohingya ayant fui la Birmanie est mort de la COVID-19.

La mort de l’homme de 71 ans, signalée officiellement lundi par les autorités locales, est un précédent qui met en relief les risques sanitaires encourus dans le cadre de la pandémie par cette population musulmane déjà fragilisée.

Les organisations internationales à pied d’œuvre pour leur venir en aide multipliaient les initiatives depuis plusieurs semaines pour empêcher la propagation du nouveau coronavirus parmi les réfugiés, tout en sachant qu’il était « inévitable » qu’il fasse des victimes.

Bien qu’un total relativement limité de 29 cas de contamination ait été enregistré à ce jour, la possibilité d’une transmission à grande échelle dans les camps demeure « très élevée », a prévenu mardi en entrevue avec La Presse la porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) au Bangladesh, Louise Donovan.

Capacité de dépistage limitée

En plus des cas confirmés, près de 150 réfugiés ont été placés en quarantaine préventive dans des bâtiments aménagés à cette fin, et des restrictions de mouvement ont été mises en place pour isoler certains secteurs des camps jugés plus problématiques.

La capacité de dépistage actuelle est trop limitée pour permettre d’avoir une image précise de la situation, relève Mme Donovan.

Un appareil d’analyse récemment donné au HCR devrait permettre, dit-elle, de faire passer le nombre de tests de 200 à 500 par jour.

PHOTO SUZAUDDIN RUBEL, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Des hommes assurant la sécurité du camp Ukhia tentent d’expliquer à des enfants le principe de distanciation physique. 

L’organisation onusienne a ouvert deux cliniques pour accueillir les malades souffrant de troubles respiratoires liés à la COVID-19.

Une dizaine de plus sont en voie d’être érigées, avec une capacité totale de près de 1900 lits. Une vingtaine de lits en soins intensifs, incluant une dizaine avec des respirateurs, ont également été prévus.

Le nombre de respirateurs paraît relativement limité, mais ils manquent « partout au Bangladesh », précise la représentante du HCR. Le pays asiatique a enregistré près de 52 000 cas d’infection et 700 morts depuis le début de la pandémie.

Premiers cas à la mi-mai

Des mesures sont envisagées pour permettre à des milliers de réfugiés de se placer en quarantaine à domicile si jamais les lits pour les personnes souffrant de la COVID-19 viennent à manquer, mais le scénario n’est pas idéal en raison de la grande densité de population et de la précarité des abris.

Les premiers cas dans les camps de réfugiés ont été enregistrés à la mi-mai, il y a deux semaines à peine.

Les organisations humanitaires internationales ont réduit de près de 80 % leur personnel sur place afin de limiter les risques de transmission du nouveau coronavirus.

Il faut trouver un équilibre de manière à assurer les services essentiels tout en réduisant les risques sanitaires.

Louise Donovan, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés au Bangladesh

Les activités éducatives prévues pour les enfants, qui forment plus de la moitié des réfugiés des camps, ont dû être revues sensiblement à la baisse faute de ressources.

Une aide a été apportée aux parents pour assurer un minimum, « mais c’est vraiment un défi important », relève Mme Donovan.

La situation n’est pas propre aux camps de réfugiés, puisque les écoles sont fermées dans l’ensemble du pays en raison de la pandémie, dit-elle.

La plupart des Rohingya vivant au Bangladesh sont arrivés en 2016 et en 2017, fuyant une offensive musclée de l’armée birmane décrite a posteriori par les Nations unies comme « une forme classique d’épuration ethnique ».

L’armée birmane maintient malgré tout que ses actions ciblaient un groupe d’insurgés rohingya, et non la population civile.