Le président chinois Xi Jinping se porte publiquement à la défense de la dirigeante contestée de Hong Kong, Carrie Lam, qui peine à endiguer les manifestations secouant l’ex-colonie anglaise depuis cinq mois.

Les deux dirigeants se sont serré la main lundi devant les médias en marge d’une importante foire commerciale tenue à Shanghai. Il s’agissait de leur première rencontre officielle depuis le début de la crise.

L’agence Xinhua rapporte que le président chinois a salué à cette occasion les efforts « importants » de Mme Lam pour « améliorer l’atmosphère sociale » à Hong Kong.

Il a précisé du même souffle que « le rétablissement de l’ordre demeurait la tâche la plus importante » à réaliser au sein du territoire semi-autonome.

Xi Jinping a ajouté que des efforts devaient encore être faits pour « dialoguer avec tous les secteurs de la société et améliorer la qualité de vie » de la population locale.

La rencontre survient quelques jours après que les autorités chinoises ont évoqué la nécessité de défendre la « sécurité nationale » à Hong Kong en renforçant la capacité d’intervention des forces de l’ordre.

Un haut responsable cité par le South China Morning Post, Shen Chunyao, a indiqué que Pékin soutiendrait les efforts du gouvernement local pour procéder à ce renforcement.

Il a par ailleurs indiqué que des mesures seraient adoptées pour « favoriser la conscience nationale et l’esprit patriotique » de la population.

« Point de non-retour »

L’appui public de Xi Jinping à Carrie Lam n’augure rien de bon, au dire de la députée prodémocratie Claudia Mo.

« C’est un spectacle de marionnettes. Ils n’étaient pas certains à son sujet, mais ils considèrent maintenant que les choses ont atteint un point de non-retour et qu’ils doivent lui donner leur approbation pour pouvoir aller de l’avant », a indiqué l’élue mardi à La Presse.

Pékin va tenter de renforcer son contrôle sur Hong Kong et rendre les choses encore plus invivables ici. La police va se comporter de manière encore plus délirante.

La députée prodémocratie Claudia Mo

Le travail des forces de l’ordre est systématiquement montré du doigt par les manifestants, qui demandent la tenue d’une commission d’enquête indépendante pour faire toute la lumière sur les dérapages survenus depuis le début de la crise.

La question recevait encore une attention soutenue des médias locaux mardi. La police a démenti qu’elle était en cause dans la chute d’un jeune homme qui est tombé d’un étage, se blessant grièvement à la tête, près d’un endroit où une confrontation avait lieu.

Le gouvernement de Carrie Lam a mis le feu aux poudres en juin dernier en tentant de faire adopter une loi d’extradition qui aurait permis le transfert de résidants recherchés par Pékin en Chine continentale.

Le projet de loi a été abandonné depuis, mais les revendications des protestataires se sont multipliées.

Ils réclament notamment l’élection au suffrage universel du chef du gouvernement alors que le processus actuel est étroitement contrôlé par Pékin. Le régime chinois a indiqué au cours des derniers jours qu’il entendait « l’améliorer », sans apporter de précisions sur ses intentions.

« C’est du vent. Les gens de Hong Kong ont été trompés à ce sujet trop de fois », affirme Claudia Mo, en référence notamment au mouvement des Parapluies de 2014.

Des centaines de milliers de personnes avaient manifesté pendant des semaines pour obtenir une révision du système en place, sans rien obtenir de Pékin.

Pékin confiant

Andrew Nathan, spécialiste de la Chine rattaché à l’Université de Columbia, indique dans une récente analyse parue dans Foreign Affairs que le gouvernement chinois a « confiance » de venir à bout du mouvement actuel sans avoir à recourir à une intervention militaire.

« Pékin pense que ses alliés locaux vont demeurer fermes et que les manifestations vont progressivement perdre le soutien public avant de disparaître », relève l’auteur.

Les dirigeants chinois sont convaincus, relève M. Nathan, que les problèmes économiques auxquels sont confrontés les résidants de Hong Kong sont à l’origine de la colère qui se manifeste dans les rues et qu’il faut conséquemment agir sur ce plan.

Les autorités ont notamment annoncé leur intention de favoriser le développement de logements sociaux pour contourner le problème de l’accès à la propriété. Le prix moyen d’une résidence dans l’ex-colonie est actuellement 20 fois plus élevé que le revenu familial moyen.