(Séoul) La Corée du Nord a affirmé jeudi avoir lancé la veille un missile balistique depuis un sous-marin dans « une nouvelle phase » de ses programmes d’armement, alors qu’elle doit reprendre des pourparlers avec Washington sur le nucléaire.

De loin l’acte de provocation le plus fort depuis le début de la détente avec les États-Unis en 2018, ce tir constitue une avancée significative dans les efforts de Pyongyang pour développer ses capacités militaires.

S’il devient opérationnel, le missile mer-sol balistique (SLBM) fera monter d’un cran la menace nucléaire nord-coréenne, car Pyongyang pourrait porter sa base d’action bien au-delà de la péninsule coréenne.  Elle offrirait également à la Corée du Nord une capacité de « seconde frappe » dans l’éventualité d’une attaque contre ses bases militaires.

PHOTO KCNA VIA KNS, AFP

« Le nouveau type de missile balistique a été tiré en mode vertical » mercredi dans les eaux au large de la Baie de Wonsan «, a indiqué l’agence officielle nord-coréenne KCNA, en identifiant le projectile comme un Pukguksong-3.

 « L’essai réussi du nouveau type de SLBM est très important, car il annonce une nouvelle phase dans l’endiguement de la menace posée par les forces extérieures. » 

Barge semi-submersible ?

Le leader nord-coréen Kim Jong-un a adressé ses « chaleureuses félicitations » aux unités de recherche impliquées dans ce tir, qui n’a eu « aucun impact néfaste sur la sécurité des pays voisins ».

Des photos publiées par le journal officiel Rodong Sinmun montrent un missile noir et blanc qui émerge de l’eau et semble propulsé vers le ciel.

PHOTO KCNA VIA KNS, AFP

Mais les clichés laissent aussi apparaître un petit remorqueur près du missile, ce qui indiquerait selon les experts que l’essai a été effectué à partir d’une barge semi-submersible plutôt que d’un véritable sous-marin.  

Ceci attesterait du fait que le système en est aux premiers stades de son développement.

Ankit Panda, de la Fédération des scientifiques américains, a présenté le projectile comme le missile nord-coréen à combustible solide à la plus longue portée. Pour lui, il constituait « sans aucun doute le premier essai de missile à capacité nucléaire depuis novembre 2017 ».  

Cela montre aussi selon lui que « les ‘hommes-fusée’ de Kim Jong-un sont restés actifs pendant les offensives de charme diplomatique de 2018-2019 ».

La Corée du Nord avait réussi en août 2016 un premier essai du Pukguksong-1, également connu sous le nom de KN-11, qui avait parcouru 500 km.

Ouverture diplomatique

Les inquiétudes quant au développement de la capacité balistique nord-coréenne avaient été renforcées en juillet quand les médias officiels nord-coréens avaient publié des photos de M. Kim inspectant un nouveau type de sous-marin. Sur un mur, était visible une affiche d’un Pukguksong-3.

Selon Tokyo, une partie du missile est tombée dans la Zone économique exclusive (ZEE) du Japon, espace maritime entourant l’archipel.

Mercredi, un porte-parole du département d’État américain a appelé la Corée du Nord à « s’abstenir de commettre des provocations » et à « rester engagée dans des négociations substantielles et soutenues » visant à apporter la stabilité et la dénucléarisation à la péninsule.

Plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies interdisent à Pyongyang de développer des missiles balistiques.

Ce lancement est intervenu au lendemain de l’annonce d’une reprise des discussions de travail entre la Corée du Nord et les États-Unis, prévues en fin de semaine en un lieu qui n’a pas été dévoilé.

Il n’est pas rare que la Corée du Nord réalise des essais militaires en pleine ouverture diplomatique, et ce afin de maintenir la pression sur ses interlocuteurs.

En septembre, le Nord avait testé ce qu’il avait présenté comme « un système de lancement multiple de fusées guidées de gros calibre » juste après avoir fait part de sa volonté de reprendre langue avec Washington.

Kim Dong-yub, chercheur à l’Institut pour les études sur l’Extrême-Orient de Séoul, a relevé que M. Kim était absent lors du tir de mercredi, ce qui est rare, le leader nord-coréen ayant assisté aux derniers essais.

 « Cela n’est probablement pas sans rapport avec les pourparlers en cours entre Pyongyang et Washington », a-t-il souligné, estimant que Kim Jong-un souhaitait moderniser son arsenal militaire sans compromettre le dialogue avec les États-Unis.

Ces négociations sur le nucléaire sont au point mort depuis le fiasco du deuxième sommet entre le président américain Donald Trump et Kim Jong-un, en février à Hanoï.