(Jakarta) La police a fait usage de gaz lacrymogènes mardi contre des étudiants qui manifestaient devant le Parlement indonésien à Jakarta, selon un journaliste de l’AFP, alors que plusieurs villes du pays connaissent depuis deux jours une vague de protestations contre des projets de lois controversés.  

Des milliers d’étudiants sont descendus dans la rue avec bannières et pancartes dans plusieurs grandes villes d’Indonésie pour protester contre des mesures risquant d’affaiblir l’agence de lutte contre la corruption (KPK) et contre une révision du code pénal vue comme liberticide.

Les députés indonésiens devaient débattre mardi d’une série de révisions drastiques du code pénal prévoyant notamment des peines de prison pour les relations sexuelles hors mariage ou entre personnes du même sexe.

Dans la capitale Jakarta, la police a tenté de disperser avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau les manifestants qui ont allumé des feux et endommagé les barrières entourant le Parlement, selon des journalistes de l’AFP.  

« Nous voulons d’abord sauver l’agence de lutte contre la corruption et nous voulons que le projet de loi qui est débattu en ce moment soit révisé […] nous ne voulons pas provoquer de chaos », a souligné Amel, un étudiant de l’université Trisakti de Jakarta, interrogé par l’AFP.  

Il se dit opposé au nouveau code pénal qui menacerait « la vie privée des gens, et spécialement des femmes ».

Des manifestations ont eu lieu également à Bali, Jogjakarta et Semarang.

À Makassar, capitale de l’île de Célèbes, le mouvement a dégénéré en affrontements violents entre des étudiants qui lançaient des pierres et les forces antiémeutes répliquant avec des gaz lacrymogènes, a constaté un photographe de l’AFP.

Nous « avons contraint les étudiants à se disperser parce qu’ils menaient des actions anarchistes, ont endommagé des équipements publics et ont lancé des pierres vers la police », a expliqué Dicky Sondani, porte-parole de la police locale.

Selon le projet de révision du code pénal, le fait de « montrer ou d’offrir » des moyens de contraception à des mineurs deviendrait illégal. Le texte prévoit aussi une application plus large de la loi controversée sur le blasphème et envisage d’interdire les « insultes » envers le président ou le vice-président.

Mais devant le concert de protestations de citoyens et de défenseurs des droits, le chef de l’État Joko Widodo a demandé la semaine dernière à ce que l’examen du texte soit repoussé à la session parlementaire suivante. Les députés ont entériné ce report mardi.

La révision du code pénal, qui date de l’époque coloniale néerlandaise, est en discussions depuis plusieurs décennies. Elle avait déjà été repoussée l’an dernier.

Les efforts des groupes musulmans conservateurs pour durcir le code pénal sur les aspects de morale sexuelle ont été vivement critiqués par les défenseurs des droits et de nombreux citoyens de ce pays de 260 millions d’habitants.  

Longtemps montrée en exemple pour la tolérance entre les différentes religions et cultures de l’archipel, l’Indonésie a pris un tournant plus conservateur sous l’influence de mouvements musulmans traditionalistes.