(New Delhi) Le premier ministre indien Narendra Modi a remporté une victoire écrasante jeudi qui a confirmé la domination de son parti nationaliste hindou à l’issue des élections législatives, et a promis de travailler «ensemble» à une Inde «forte».

«Ensemble nous progressons. Ensemble nous sommes prospères. Ensemble nous allons bâtir une Inde forte et ouverte. L’Inde gagne encore une fois!», a lancé le premier ministre de 68 ans après avoir a fait une entrée triomphale au siège du Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien) à New Delhi sous une pluie de pétales de roses et les hourras de ses partisans.

Selon des chiffres actualisés dans la soirée au fil du dépouillement encore en cours, le BJP de M. Modi était en passe d’accentuer encore sa victoire avec 303 sièges - une majorité absolue - sur 543 députés élus pour 5 ans à la chambre basse du Parlement, à l’issue d’un scrutin gigantesque étalé sur six semaines.

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Narendra Modi

Principale formation d’opposition, le Congrès devrait remporter seulement une cinquantaine de circonscriptions, une douche froide pour ce parti clé de la politique indienne depuis l’indépendance en 1947. Son leader Rahul Gandhi a reconnu la défaite et félicité M. Modi

Le BJP détenait précédemment 284 sièges, et ce sera la première fois en cinq décennies qu’un premier ministre sortant sera reconduit avec une majorité renforcée.  

Donald Trump a félicité Narendra Modi pour sa «grande» victoire. «De grandes choses attendent le partenariat indo-américain avec le retour du premier ministre Modi aux commandes», a tweeté le président américain.

Le président russe Vladimir Poutine, le chef de l’État français Emmanuel Macron, le premier ministre japonais Shinzo Abe et son homologue israélien Benyamin Nétanyahou, notamment, l’ont appelé pour le féliciter avant même les résultats officiels, selon le ministère des Affaires étrangères.

Devant ses supporters, M. Modi a vanté ces élections gigantesques, étalées sur six semaines, qui «reflètent l’attachement du peuple à la démocratie». «Le monde entier devra en prendre acte et reconnaître la force démocratique de l’Inde», a encore  lancé M. Modi, dont le premier mandat à la tête de cette nation de 1,3 milliard d’habitants a cependant été marqué par une crispation politico-religieuse et une polarisation de la société.

«Nation hindoue»

Pratiquant une ultra-personnification du pouvoir et doté d’un sens politique aiguisé, Narendra Modi avait fait de ces législatives un quasi-plébiscite. Cet adepte d’une gouvernance par coups d’éclat (bombardement au Pakistan, démonétisation surprise de billets…) avait axé sa campagne sur un discours sécuritaire anxiogène, s’érigeant en défenseur de la nation.

«Il a amené le programme nationaliste hindou dans chaque foyer. Il a dit que le pays était en danger à cause du Pakistan et les gens l’ont cru», analyse Hemant Kumar Malviya, professeur de sciences politiques à l’université hindoue de Varanasi.

Plus tôt dans la journée au siège du BJP, des militants du parti fêtaient leur victoire en allumant des pétards et en dansant au rythme de tambours. «Le drapeau safran a gagné, l’heure est venue pour la nation hindoue», criait un homme dans un haut-parleur.

«Modi rendra sa grandeur à l’Inde», a déclaré Santosh Joshi, un partisan du BJP, en référence au slogan électoral de Donald Trump, Make America Great Again. «Modi est le premier ministre le plus fort que l’Inde ait jamais eu et aura jamais».

Dans un contraste frappant, les militants du Congrès avaient déserté leur quartier général dans l’après-midi. «Modi a menti tout du long et a trompé le pays et ses soutiens», affirmait l’un d’eux, Dinesh Koushik.

Des stars de Bollywood aux modestes vendeurs de rue, des agriculteurs de la plaine du Gange aux magnats milliardaires, 67% des 900 millions d’électeurs indiens se sont exprimés pour ces 17e législatives depuis l’indépendance.

Congrès pulvérisé

Narendra Modi, charismatique fils d’un vendeur de thé du Gujarat, affrontait dans les urnes une myriade de puissants partis régionaux bien décidés à le faire chuter, ainsi que l’historique parti du Congrès emmené par l’héritier de la dynastie politique des Nehru-Gandhi, Rahul Gandhi.

AFP

Rahul Gandhi

Le BJP a infligé au Congrès l’une des pires défaites de son histoire, cinq ans après l’humiliation de 2014, qui risque de plonger la formation fondée en 1885 dans une nouvelle crise.

Preuve du séisme : Rahul Gandhi a même perdu la circonscription familiale d’Amethi, dans l’Uttar Pradesh, l’un des bastions traditionnels des Nehru-Gandhi. Il siégera tout de même au Parlement car il se présentait en parallèle dans une circonscription du Kerala.

«La campagne (du Congrès) a été un désastre et leur existence même est maintenant en question», a estimé Hartosh Singh Bal, journaliste politique au magazine The Caravan.

L’Inde et le Pakistan ont connu une grave crise au début de l’année, allant jusqu’à des combats aériens entre leurs deux armées au-dessus de la région disputée du Cachemire.

Mais Imran Khan, le chef de gouvernement pakistanais, a lui aussi félicité M. Modi, écrivant sur Twitter avoir «hâte de travailler avec lui pour la paix, le progrès et la prospérité en Asie du Sud». M. Modi l’a remercié pour ses «bons vœux» et a déclaré vouloir lui aussi la paix dans la région.

Cet échange est survenu quelques heures après que le Pakistan a testé un missile balistique capable d’emporter une charge nucléaire. L’Inde avait testé un missile de croisière supersonique mercredi.