Présenté comme un succès par Pyongyang, le tir de la fusée nord-coréenne va raffermir le pouvoir du numéro un Kim Jong-il, dont l'état de santé est sujet à caution, devant le Parlement récemment élu qui se réunit jeudi, selon des analystes.

Apparu pour la première fois mardi à la télévision nord-coréenne depuis son attaque cérébrale présumée de l'été dernier, le «Cher dirigeant» assistera à coup sûr, selon le ministère sud-coréen de l'Unification, à la réunion inaugurale de la 12e Assemblée populaire suprême, instance pivot du régime, renouvelée en mars dernier.

Pour les analystes, le Parlement, qui doit sans surprise réélire Kim au poste-clef de président de la Commission nationale de Défense, s'efforcera avant tout de stabiliser le pouvoir de son dirigeant, âgé de 67 ans.

«L'Assemblée s'attachera à renforcer l'emprise de Kim. Elle s'appuiera pour ce faire sur le soi-disant succès du lancement de sa fusée dimanche, glorifié par le régime», a estimé Kim Yong-hyun, professeur à l'Université Dongguk de Séoul.

Mercredi, 100 000 Nord-Coréens, selon l'agence officielle du régime KCNA, ont défilé sur la place Kim Il-sung de Pyongyang en l'honneur du lancement. Choe Thae-bok, secrétaire du Parti des Travailleurs de Corée (du nord), a qualifié le tir de «fière victoire» qui inflige «un grave revers» aux «impérialistes».

Les médias nord-coréens ont insisté sur le fait que leur lanceur a bel et bien mis en orbite un satellite, malgré les démentis de Séoul, Tokyo et de l'armée américaine, pour lesquels aucun engin de ce type n'a été détecté.

Les Occidentaux, pour qui le tir ne servait qu'à dissimuler un essai de missile balistique à longue portée, s'efforcent d'obtenir une condamnation ferme de Pyongyang, mais sans obtenir l'appui de la Chine ni de la Russie.

L'ambassadeur nord-coréen adjoint à l'ONU, Pak Tok-hun, a prévenu mardi que son pays réagirait fermement à toute condamnation à l'ONU.

«Si le Conseil de sécurité prend quelque mesure que ce soit, nous la considérerons comme une atteinte à notre souveraineté», a dit M. Pak. «Ce sera à nous de décider de l'étape suivante, des mesures nécessaires et fermes suivront», a-t-il averti.

Pyongyang a déjà averti que de nouvelles sanctions de l'ONU seraient perçues comme «un acte hostile» entraînant la rupture des négociations sur sa dénucléarisation, actuellement enlisées.

Pyongyang, qui accuse Tokyo d'avoir déployé des navires de guerre à la recherche des étages de la fusée tombée en mer, a sommé mercredi le Japon de renoncer à rechercher des débris du lanceur, évoquant une «provocation militaire intolérable».

Si les experts s'accordent pour dire que le tir de dimanche n'a pas été concluant, la Corée du Nord a cependant amélioré sa technologie balistique, a estimé mercredi le porte-parole du gouvernement japonais, au vu des images du lancement.

La fusée «a été tirée avec des moyens plus évolués que les dernières fois», a souligné Takeo Kawamura, ajoutant que cette fusée était nettement plus grande que celles tirées précédemment par le régime communiste.

Quoi qu'il en soit, le message du régime de Pyongyang à sa population «est que le pouvoir de Kim Jong-il reste intact, à l'abri de tout danger et sans rival», a estimé Scott Snyder, analyste à la Asia Foundation.

Si selon Kim Yong-hyun, il sera «difficile pour l'Assemblée de nommer au grand jour un successeur à Kim», il faudra suivre avec attention un possible «changement de génération» à la Commission nationale de la Défense.

Kim Jong-il a pris officiellement en 1997 les rênes du pouvoir, trois ans après la mort de son père Kim Il-sung, le fondateur de la République populaire et démocratique de Corée (RPDC).