En Thaïlande, le calvaire des centaines de milliers de touristes bloqués touche à sa fin, mais la crise politique se complique pour les 63 millions d'habitants de ce pays du Sud-Est asiatique.

La Cour constitutionnelle a remis hier une victoire aux manifestants royalistes du PAD (Alliance du peuple pour la démocratie), qui paralysaient le pays depuis des mois, en démettant, pour fraudes, le premier ministre Somchaï Wongsawat.

 

La Cour a aussi dissous trois des six partis de la coalition gouvernementale, dont le Parti du pouvoir populaire (PPP) de Wongsawat, qui, lui, est interdit de toute activité politique pour cinq ans.

Les militants du PAD, vêtus du jaune royaliste, ont jubilé à la chute du régime, ce qu'ils réclamaient depuis longtemps.

Ils avaient assiégé les locaux du gouvernement à Bangkok, ce qui avait obligé l'administration Wongsawat à déménager à l'aéroport national de Don Maeung, d'où elle continuait malgré tout de fonctionner.

Ils ont alors «internationalisé» la crise en occupant l'aéroport international de Suvarnabhumi, à Bangkok, empêchant jusqu'à hier 400 000 touristes de rentrer chez eux. Ils ont ensuite étendu l'occupation à Don Maeung.

Selon Ottawa, un millier de Canadiens sont bloqués en Thaïlande.

Accord pour rouvrir les aéroports

Après le jugement de la Cour, le fondateur de la PAD, Sondhi Limthongkul, a promis l'arrêt des manifestations aujourd'hui, deux jours avant les 81 ans du roi Bhumibol Adulyadej.

La PAD «a accepté de cesser les manifestations après une longue campagne de 192 jours. Nous avons remporté une victoire et atteint nos objectifs», a-t-il dit.

Le président de l'Autorité aéroportuaire (AOT), Vudhihaandhu Vichairatama, a annoncé un accord avec le PAD pour évacuer Suvarnabhumi.

Un premier vol pourrait partir «d'ici 24 heures s'il n'y a pas d'obstacle technique», a-t-il dit. Mais d'autres responsables ont indiqué que la remise en état du site et les vérifications d'usage pourraient prendre quelques jours.

Les États-Unis ont dit espérer hier que la crise en Thaïlande sera résolue après le verdict de la Cour constitutionnelle. Momentanément désamorcée, la crise n'est cependant pas résolue.

Quelque 10 000 partisans du gouvernement sortant, vêtus de rouge, étaient rassemblés hier devant l'Administration métropolitaine de Bangkok pour protester contre ce «coup d'État déguisé».

Les trois partis au pouvoir, dont le PPP, ont été sanctionnés pour «achats de voix» aux législatives de 2007, qui avaient mis fin à 15 mois de régime militaire après le renversement du premier ministre Thaksin Shinawatra.

Le PPP regroupait les lieutenants de Thaksin, dont le parti TRT avait été dissous en 2007, et dont Somchai est le beau-frère. La Cour a exclu hier 109 d'entre eux de la scène politique thaïlandaise.

Anticipant un scénario analogue, le PPP a créé une «coquille» politique appelée Pheu Thai (Pour les Thaïlandais), où les 216 députés épargnés hier entendent se regrouper.

Mais la PAD menace de reprendre son combat si les alliés de Thaksin restent au pouvoir ou tentent d'«amender la Constitution ou de brider la monarchie».

Les opposants refusent le suffrage universel sous prétexte que les pauvres sont trop bêtes pour élire le gouvernement. Ils veulent un gouvernement tiré des élites royalistes et féodales, avec un Parlement purement consultatif.

La crise a été violente parfois, et les affrontements entre opposants et partisans, ainsi que des attentats à la grenade, ont fait sept morts et des centaines de blessés depuis août. L'armée a cependant refusé d'intervenir.

La crise a porté un dur coup à l'importante industrie touristique, dont les pertes se chiffrent en milliards de dollars. Le chaos a aussi coûté la vie à quatre étrangers - deux Canadiens, un Néerlandais et un Hongkongais - qui tentaient de prendre des vols dans le Sud et ont été tués dans des accidents de la route.

Avec AFP, AP, Reuters, Bangkok Post, The Nation, BBC, CNN