L'Inde a affirmé lundi que les auteurs des attentats de Bombay venaient du Pakistan, estimant que ces attaques portaient «un coup sérieux» aux relations bilatérales, tandis que la presse faisait état d'avertissements des services de renseignement qui auraient été ignorés.

«Les terroristes tués dans les affrontements de Bombay étaient d'origine pakistanaise», a déclaré le vice-ministre indien de l'Intérieur Shakeel Ahmad à la BBC, précisant qu'il n'accusait pas le gouvernement mais que le territoire pakistanais était utilisé pour des activités «anti-indiennes».

Des sources gouvernementales indiennes ont accusé le groupement illégal Lashkar-e-Taïba, basé au Pakistan et actif au Cachemire, qui aurait reçu, selon elles, l'aide d'une partie des puissants services secrets pakistanais.

«Nous devons faire face depuis quelque temps déjà à une vague montante de terrorisme, mais les attaques de Bombay ont été de facture différente, et requièrent une action sévère et immédiate», a déclaré à la presse la porte-parole du parti du Congrès au pouvoir, Jayanti Natarajan.

Le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères Anand Sharma a déclaré à l'AFP que les attaques portaient un «coup sérieux au processus de normalisation» avec le Pakistan.

Le seul assaillant capturé Ajmal Amir Kamal, 21 ans, a indiqué aux enquêteurs que tous étaient des Pakistanais entraînés par le Lashkar-e-Taïba, selon la presse indienne, citant les services de renseignements.

Les deux pays voisins, qui se sont affrontés au cours de trois guerres, devenus des puissances nucléaires, avaient failli connaître un quatrième conflit en 2001 après un attentat contre le Parlement indien attribué au Lashkar-e-Taïba.

Attendue mercredi à New Delhi, la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice, a appelé lundi le Pakistan à une «coopération complète, absolue et totale» dans l'enquête, tout en assurant «ne pas vouloir tirer de conclusions hâtives».

Dans une interview au Financial Times, le président pakistanais Asif Ali Zardari a rejeté toute suggestion de complaisance envers les islamistes. «Même si ces activistes sont liés au Lashkar-e-Taïba, qui croyez-vous que nous combattons ?» a dit M. Zardari, relevant que l'armée pakistanaise luttait contre des extrémistes sur sa frontière avec l'Afghanistan.

L'ambassadeur du Pakistan à Washington, Husain Haqqani, a exhorté l'Inde à éviter un discours de confrontation, faisant valoir qu'il «y a des terroristes qui s'entraînent secrètement dans tous les pays du monde. Ils n'agissent pas au nom d'un pays».

Sur le plan intérieur, l'attitude des autorités indiennes continuait de provoquer des remous.

Selon le journal Hindustan Times, les services de renseignements disposaient d'informations précises concernant la préparation par des militants du Lashkar-e-Taïba d'une attaque sur des hôtels cinq étoiles de Bombay (ouest), depuis l'arrestation en février d'un membre du Lashkar dans le nord de l'Inde.

Les services de renseignements avaient en outre prévenu le Conseil de sécurité nationale en septembre que l'hôtel Taj Mahal pourrait être une cible et le 12 novembre qu'une attaque éventuelle viendrait de la mer, a ajouté le Times of India, citant le RAW (renseignement militaire).

Au lendemain de la démission du ministre de l'Intérieur Shivraj Patil et de l'annonce que le conseiller à la sécurité nationale M.K. Narayanan avait présenté la sienne, le chef du gouvernement local de l'Etat de Maharashtra, où se trouve Bombay, Vilasrao Deshmukh, a indiqué qu'il avait fait de même.

Le chef du corps des garde-côtes, critiqué pour ne pas avoir intercepté les assaillants venus par la mer, «est parti à la retraite» dimanche, selon l'agence PTI.

Dans un contexte de crise économique mondiale, le Premier ministre indien Manmohan Singh a pris en charge le portefeuille des Finances dont l'ancien titulaire, Palaniappan Chidambaram, a été nommé dimanche à l'Intérieur.

Les attaques ont fait au moins 172 morts, dont une trentaine d'étrangers, selon un dernier bilan.

Un appareil de l'armée de l'air israélienne est arrivé à Bombay avec, à son bord, des médecins légistes, des représentants de l'armée, du rabbinat et du ministère des Affaires étrangères.

Huit Israéliens ont été tués dans un centre juif orthodoxe de Bombay parmi lesquels un rabbin et sa femme. Un service religieux très émouvant a eu lieu lundi dans la synagogue de Bombay.

Dans le reste de la ville, s'esquissait un début de retour à la normale. Bombay a retrouvé ses problèmes de circulation et les forces de sécurité ont rendu le contrôle du Taj Mahal, où les combats ne se sont achevés que samedi, à ses propriétaires.