(Rio de Janeiro) Les bureaux de vote ont fermé dimanche au Brésil, où plus de 156 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes pour une présidentielle que le favori Lula espère remporter dès le premier tour face au sortant Jair Bolsonaro, qui menace de contester le résultat.

Ce résultat devrait être connu quelques heures après le début du dépouillement. Les bureaux de vote ont fermé à 17 h (16 h HAE).

Les Brésiliens se sont pressés en masse pour choisir leur président, mais aussi les députés, un tiers des sénateurs et les gouverneurs des 27 États, avec des longues files d’attente dans cet immense pays aux dimensions continentales.

PHOTO ANDRE COELHO, ASSOCIATED PRESS

Le président sortant, Jair Bolsonaro, au bureau de vote

« Si les élections sont propres, aucun problème. Que le meilleur gagne ! », a déclaré le président Bolsonaro, 67 ans, en votant en matinée à Rio de Janeiro.

Agacé par les questions insistantes de la presse, Bolsonaro, vêtu du maillot jaune et vert de l’équipe nationale de football sous lequel il portait un gilet pare-balle, n’a pas voulu dire clairement s’il reconnaîtrait le résultat.

Il est pourtant distancé par Lula dans les sondages (50 % contre 36 %), avec un taux de rejet record en raison de son déni face à la COVID-19 qui a fait plus de 680 000 morts au Brésil, et de la crise économique dans un pays où plus de 30 millions de personnes souffrent de la faim.

PHOTO NELSON ALMEIDA, AGENCE FRANCE-PRESSE

L’ancien président de gauche, Luiz Inacio Lula da Silva, embrasse son bulletin de vote.

L’ex-président de gauche (2003-2010) Luiz Inacio Lula da Silva, 76  ans, a voté peu avant à Sao Bernardo do Campo, banlieue ouvrière de Sao Paulo.

« Pour moi, c’est l’élection la plus importante », a affirmé l’ancien métallo, qui dispute sa sixième course présidentielle pour briguer un troisième mandat, 12 ans après avoir quitté le pouvoir à un taux de popularité stratosphérique (87 %).

« Nous ne voulons plus de haine, de discorde. Nous voulons un pays en paix » a-t-il dit en référence aux fractures d’un Brésil très polarisé, qui compte 214 millions d’habitants.

Dans les bureaux de vote, les électeurs souvent habillés du jaune et vert bolsonariste ou du rouge luliste ont dû patienter parfois plusieurs heures pour voter en raison de l’affluence.

« Fiabilité et transparence »

« On a vraiment peur parce que le climat est tendu, mais on a préféré montrer notre opinion », a déclaré à Sao Paulo Isabela Queiroz, 39 ans, venue voter, vêtue en rouge, avec une amie.  

À la mi-journée, le président du Tribunal supérieur électoral (TSE), Alexandre de Moraes, a assuré que le vote se déroulait « sans problème », et a tenu à « réaffirmer la fiabilité et la transparence » du système d’urnes électroniques, moult fois critiqué par Jair Bolsonaro.

« Je suis chrétienne, je ne vote que pour les candidats qui sont d’accord avec ce qui est écrit dans la Bible, alors je vote Bolsonaro », dit Aldeyze dos Santos, 40 ans, femme au foyer interrogée par l’AFP à Brasilia.

En Amazonie, des indigènes Kambeba faisaient le « L » de Lula avec les doigts et se sont rendus dans une école pour aller voter au moyen de pirogues à moteur sur le fleuve Rio Negro, a constaté l’AFP.

Jair Bolsonaro a été très critiqué au cours de son mandat pour sa politique environnementale, avec une déforestation record et une recrudescence des intrusions d’orpailleurs ou trafiquants de bois dans les réserves indigènes.

Sécurité renforcée

Au fil de cette élection cruciale pour l’avenir de la jeune démocratie au Brésil, le choc au sommet Lula-Bolsonaro a relégué les neuf autres candidats au rang de figurants.

« La question est de savoir s’il y aura un deuxième tour ou non, et c’est impossible à prédire », déclare à l’AFP Adriano Laureno, analyste chez les consultants Prospectiva.  

Une victoire de Lula signerait un retour inespéré quatre ans après son incarcération controversée pour des soupçons de corruption.

Sa campagne a lancé un appel au « vote utile » pour une victoire dès le premier tour. Cela lui éviterait quatre semaines supplémentaires de campagne à couteaux tirés jusqu’à un second tour le 30 octobre, qui pourrait permettre au populiste Bolsonaro de galvaniser ses troupes et de trouver un nouvel élan.

« Je pense que Bolsonaro va contester le résultat s’il perd », dit M. Laureno, « mais cela ne veut pas dire qu’il va réussir. La communauté internationale va reconnaître le résultat rapidement ».

Beaucoup redoutent un remake brésilien de l’assaut du Capitole à Washington en 2021 après la défaite de Donald Trump.

L’armée n’a donné aucun signe d’agitation et les États-Unis ont indiqué qu’ils allaient « suivre de près » l’élection, tandis que plus de 500 000 membres des forces de l’ordre étaient mobilisés pour assurer la sécurité.