(Guatemala) Une centaine de journalistes ont manifesté samedi au lendemain de l’arrestation de José Rubén Zamora, fondateur du quotidien El Periódico, très critique envers le président Alejandro Giamattei et la procureure générale Consuelo Porras, a constaté l’AFP.

M. Zamora avait été arrêté vendredi à son domicile dans le sud de la capitale dans le cadre d’une enquête pour blanchiment d’argent, a déclaré à l’AFP Juan Luis Pantaleón, porte-parole du parquet.  

« Il a été arrêté dans le cadre d’un potentiel cas de blanchiment d’argent. Ceci n’est pas lié à son travail de journaliste, mais en tant qu’homme d’affaires », avait-il assuré.

La police et les procureurs ont également perquisitionné le siège du journal, la rédaction y voyant des représailles après des articles accusant le gouvernement et Mme Porras de corruption.  

« La procureure générale [Consuelo Porras] a exécuté les menaces proférées à l’encontre du président d’El Periódico. Ils ne nous feront pas taire », a réagi le journal sur ses réseaux sociaux, après l’arrestation.  

Dans son édition de samedi, le journal a accusé le président Giamattei d’être à l’initiative de l’arrestation.

Une centaine de collègues de M. Zamora, auxquels il a annoncé entamer une grève de la faim, ont manifesté samedi devant le tribunal, rejoints par d’autres confrères, a constaté un photographe de l’AFP.

Les pancartes brandies dans le rassemblement proclamaient « Sans journaux, pas de démocratie », ou encore « On ne nous fera pas taire ».

Durant son transfert au tribunal, M. Zamora avait indiqué qu’il se tiendrait à la disposition de la justice. « J’imagine qu’il doit y avoir une conspiration, une persécution […] et si c’est le cas, l’amour du Guatemala doit se payer par la prison », avait-il ajouté.  

En septembre dernier, l’Association interaméricaine de la presse (IAPA) avait condamné la décision de la justice guatémaltèque d’ouvrir une enquête sur El Periódico pour avoir publié un témoignage accusant Mme Porras de corruption.  

« Nous sommes dans un moment très difficile. Je ne voudrais pas penser que nous sommes en train de devenir le Nicaragua 2.0 », a déclaré le médiateur guatémaltèque Jordan Rodas, faisant référence aux condamnations de journalistes critiques à l’égard du président Daniel Ortega dans le pays voisin ces dernières années.

En juin, la Commission interaméricaine des droits de la personne a ajouté le Guatemala à la liste de pays qui connaissent de graves violations des droits de la personne. Cuba, le Venezuela et le Nicaragua figurent également sur celle-ci.

Le parquet, sous la direction de Mme Porras, a été mis en cause pour avoir arrêté et poursuivi plusieurs juges et procureurs antimafia. La procureure a été sanctionnée par Washington et incluse dans la Liste Engel de personnalités « corrompues et antidémocratiques » identifiées par les États-Unis.