(Quito) La plus grande organisation de peuples indigènes a entamé lundi un nouveau cycle de manifestations et de barrages routiers en Équateur pour protester contre la hausse des prix des carburants et du coût de la vie.

Les manifestations ont débuté dans la nuit, elles se sont déroulées sans violence notable, a constaté l’AFP autour de la capitale Quito.

Selon les autorités, elles sont restées d’une ampleur limitée, avec seulement 3800 manifestants dans tout le pays, répartis sur les divers barrages de fortune faits de terre, de pierres, d’arbres ou de pneus.

« La situation reste complètement sous contrôle », a déclaré un responsable gouvernemental, Francisco Jimenez, lors d’une conférence de presse à Quito, ajoutant que le nombre de manifestants était « sensiblement inférieur » à ce qui était prévu.

Aucune arrestation ni aucun blessé n’ont été enregistrés au cours des manifestations du jour, a précisé le ministre de l’Intérieur, Patricio Carillo, selon lequel les barrages se sont concentrés à Pichincha (autour de Quito) et dans les provinces voisines de Cotopaxi (Sud) et d’Imbabura (Nord).

Ces blocages sont organisés par la Confédération des nationalités indigènes de l’Équateur (CONAIE), la plus grande organisation de peuples indigènes. Elle avait mené les violentes manifestations d’octobre 2019 et participé aux soulèvements qui ont renversé trois présidents entre 1997 et 2005.

Les indigènes sont environ un million en Équateur, sur 17,7 millions d’habitants.

Selon la CONAIE, des actions ont eu lieu dans 16 provinces du pays, « la mobilisation nationale gagne en force », a-t-elle assuré sur Twitter. L’un des principaux points des protestations était à San Juan de Pastocalle, à une vingtaine de kilomètres au sud de Quito, sur l’autoroute Panaméricaine, a constaté l’AFP.

« Vive la grève ! »

Le président de la CONAIE, Leonidas Iza, a prévenu que les manifestations sont pour une durée « indéterminée ». Interrogé lundi à Pastocalle sur de possibles négociations avec le gouvernement, M. Iza a répondu : « Nous avons déjà eu trois tentatives de négociations. Cette nouvelle mobilisation n’est pas pour demander de nouveaux pourparlers, mais pour exiger des réponses concrètes ».

Il a ensuite indiqué sur Twitter qu’« une fois de plus, nous avons mis sur la table du gouvernement et formellement nos 10 demandes et propositions qui attendent une réponse ».

Aux cris de « Vive la grève », ils étaient des dizaines d’indigènes, les femmes enroulées dans des couvertures colorées, à protester à Pastocalle devant une barricade de pneus enflammés sur la chaussée.

« Nous devons nous lever pour nos enfants, pour bien vivre », lance Maria Dolores Ayala, une indigène de 49 ans de la communauté de Maca Grande. Les prix des oignons, de l’orge, des pommes de terre et des haricots qu’elle produit sont « au plus bas », proteste-t-elle, et l’argent durement gagné suffit à peine à faire vivre sa famille.

La puissante CONAIE proteste contre la hausse des prix des carburants, mais aussi contre le manque d’emplois, pour un contrôle des prix des produits agricoles, et contre l’octroi de concessions minières dans les territoires autochtones.

Depuis 2020, le prix du gallon (3,78 litres) de diesel a presque doublé, passant de 1 à 1,90 dollar, et celui de l’essence a augmenté de 46 %, passant de 1,75 à 2,55 dollars.

La CONAIE, qui a tenu plusieurs dialogues avec le gouvernement, demande une baisse des prix à 1,50 dollar pour le diesel et à 2,10 dollars pour l’essence.

« L’armée et la police sont mobilisées pour garantir l’ordre public », a assuré le ministre de l’Intérieur, accusant une « minorité, sous des intérêts absolument populistes, d’essayer de mettre le chaos le pays ».

« Les manifestations pacifiques oui, le vandalisme non. Non aux blocages de routes non et aux barrages routiers », a prévenu de son côté le ministre Jimenez.

Des militaires ont été déployés dans les zones et lieux stratégiques, comme les installations pétrolières, toujours selon les autorités. Le pétrole brut est le principal produit d’exportation du pays.

Au pouvoir depuis un an, le président Guillermo Lasso a prévenu dimanche et lundi qu’il n’autoriserait pas le blocage des routes ni l’occupation des puits de pétrole situés dans la jungle amazonienne où se déroulent également des manifestations.

« Nous n’allons pas permettre que le pays soit paralysé », a-t-il répété lundi.