(La Haye) La Cour pénale internationale (CPI) a rejeté lundi une demande, formulée par la Bolivie, d’enquête pour crimes contre l’humanité concernant l’ancien président Evo Morales et les organisateurs d’un vaste mouvement de barrages routiers.

Le gouvernement bolivien avait demandé en septembre 2020 à la CPI d’enquêter sur cette campagne de blocage des routes organisée par des soutiens de M. Morales. Selon La Paz, le mouvement a provoqué la mort de plus de 40 malades de la COVID-19 parce que l’oxygène n’a pu être livré à temps aux hôpitaux.

Mais le procureur en chef de la CPI, Karim Khan, a déclaré lundi qu’il n’allait pas ouvrir une enquête officielle concernant les barrages boliviens, car les actes visés n’entrent pas dans les attributions de la cour, basée à La Haye.

« Au terme d’une évaluation approfondie et indépendante des informations à la disposition de mon bureau, j’ai conclu que les critères fixés par le Statut de Rome […] pour l’ouverture d’une enquête n’étaient pas remplis », a indiqué M. Khan dans un communiqué.

« Je suis parvenu à la conclusion que le comportement allégué ne réunissait pas les éléments contextuels constitutifs de crimes contre l’humanité », a-t-il ajouté.

Le Statut de Rome définit les règles selon lesquelles la CPI a été créée en 2002 pour juger les pires crimes de la planète.

Les États peuvent signaler officiellement des crimes présumés à la CPI, qui mène alors une enquête préliminaire avant de décider s’il est nécessaire d’ouvrir une enquête approfondie.

La saisine bolivienne accusait M. Morales et les organisateurs des barrages routiers d’avoir délibérément immobilisé, pendant leur campagne de 12 jours, des fournitures médicales urgemment nécessaires dans des hôpitaux.

Les blocages avaient commencé en août 2020 après un nouveau report des élections par le gouvernement.

Pour M. Khan, « les informations disponibles ne fournissent pas de base raisonnable permettant de croire que les crimes prétendument commis par les organisateurs du blocus et les personnes y ayant pris part — même si ces crimes étaient établis — ont constitué une campagne dirigée contre la population civile de Bolivie », et donc un crime contre l’humanité.

Le procureur précise que sa décision ne doit « en aucun cas être considérée comme une prise de position sur les évènements ou les dynamiques se rapportant aux faits allégués ni sur les expériences vécues par le peuple bolivien lors des évènements en cause ».

Evo Morales, premier Amérindien à gouverner la Bolivie (2006-2019), avait fui en exil en 2019 après presque 14 ans au pouvoir, à cause de grandes manifestations contre sa réélection jugée frauduleuse la même année. Concernant les barrages routiers, il a dénoncé une « campagne de discrédit » contre lui.