(Guatemala) Kamala Harris est arrivée dimanche au Guatemala, avant de se rendre au Mexique, un premier voyage international pour la vice-présidente américaine qui affirme vouloir « donner de l’espoir » à une région d’où viennent la majorité des migrants arrivant à la frontière sud des États-Unis.   

Chargée par Joe Biden en mars du dossier sensible de l’immigration clandestine, l’ex-candidate à la présidentielle est restée jusqu’ici en retrait sur cette épineuse question, et plus généralement discrète depuis son arrivée à la Maison-Blanche le 20 janvier.

Elle veut désormais élaborer une stratégie globale pour s’attaquer aux causes de l’afflux de milliers de migrants qui complique le début de mandat du président démocrate.  

Une tâche « difficile », selon Michael Shifter, président du centre de réflexion Inter-American Dialogue.  

« Nous devons donner aux gens un sentiment d’espoir, que l’aide est en train d’arriver, que s’ils restent [dans leurs pays d’origine], cela va s’améliorer », insiste l’ex-sénatrice de Californie.  

« Conversations très franches »

Après un problème technique qui a forcé son avion à faire demi-tour juste après le décollage, la vice-présidente s’est finalement posée sur la base aérienne située au sud de Guatemala, où elle a été accueillie par le ministre des Affaires étrangères guatémaltèque Pedro Brolo, avant une rencontre prévue lundi avec le président Alejandro Giammattei.  

À l’extérieur de la base, une trentaine de personnes, majoritairement d’anciens militaires de droite, sympathisants de l’ancien président Donald Trump, ont manifesté contre cette visite aux cris de « Kamala, dehors » ou « Kamala, mêle-toi de tes affaires ».

Mardi, la vice-présidente sera au Mexique pour rencontrer le président Andres Manuel Lopez Obrador.

Elle s’entretiendra aussi avec des représentants de la société civile, et des dirigeants syndicaux et patronaux, précise son équipe.

Kamala Harris a dit vouloir avoir « des conversations très franches et honnêtes » à propos de « la nécessité » de lutter contre la corruption, les crimes et la violence au Guatemala, en particulier lorsque ces maux visent « certaines des populations les plus vulnérables ».

Elle « dit ce qu’elle pense, ce qui est bien. Elle est franche », a reconnu le président guatémaltèque sur CBS, dans un entretien diffusé dimanche.

Pour le ministre mexicain des Affaires étrangères, Marcelo Ebrard, il s’agira principalement de trouver des accords « pour accélérer la croissance des investissements et du bien-être social dans le sud du Mexique, ainsi qu’au Guatemala, au Honduras et au Salvador, pour que l’émigration ne soit qu’une option et pas une obligation du fait de la pauvreté et l’insécurité ».

Le nombre de migrants sans papiers arrêtés à la frontière entre le Mexique et les États-Unis a atteint en avril son plus haut niveau depuis 15 ans.  

Parmi ces plus de 178 600 migrants dont des mineurs arrivés seuls, 82 % venaient du Mexique et du « triangle nord » de l’Amérique centrale – Guatemala, Honduras et Salvador.

Vaccins

Les millions de doses de vaccins anti-COVID-19 promises par Washington à l’Amérique latine devraient aussi être évoquées.

Kamala Harris a prévenu directement par téléphone les chefs d’État guatémaltèque et mexicain jeudi, juste avant que Joe Biden n’annonce qu’une première tranche de six millions de doses serait distribuée en Amérique latine et aux Caraïbes par le biais du mécanisme Covax, et que six autres millions seraient livrées directement par Washington à des pays partenaires comme le Mexique, le Canada ou encore l’Égypte.

« Un engagement réel » sur la quantité de vaccins à envoyer aux pays du triangle nord « serait un résultat très positif » du voyage de Mme Harris, juge Rebecca Bill Chavez, experte dans les questions de sécurité et démocratie.

La tournée de la vice-présidente s’inscrit dans le cadre de la promesse de Joe Biden d’adopter une politique migratoire plus « humaine » après l’approche sévère de son prédécesseur Donald Trump.

Mais les défis auxquels est confrontée Kamala Harris semblent plus complexes que ceux rencontrés par le président démocrate lorsqu’il était chargé du même dossier, en tant que numéro deux de Barack Obama (2009-2017).

« Les conditions se sont considérablement détériorées depuis 2014 », confirme Michael Shifter, selon qui la pandémie a beaucoup aggravé la situation économique et la violence. La tâche de l’ancienne procureure s’annonce donc « beaucoup plus difficile », avec des « partenaires beaucoup plus problématiques ».

Plusieurs responsables politiques du « triangle nord » ont été désignés en mai par l’administration Biden comme des « fonctionnaires corrompus ».

Et le président hondurien Juan Orlando Hernandez a été mis en cause par un tribunal de New York dans le cadre de la condamnation de son frère pour trafic de cocaïne aux États-Unis.

L’opposition républicaine, elle, accuse Joe Biden d’être responsable d’une « catastrophe frontalière », affirmant qu’il a créé un véritable appel d’air en assouplissant les politiques migratoires de son prédécesseur.