(Rio de Janeiro) Les chiffres morbides de la pandémie de COVID-19 volent de record en record au Brésil, qui a dépassé mercredi le seuil des 300 000 morts en un an d’une pandémie désormais hors de contrôle.

Le Brésil de Jair Bolsonaro traverse le pire moment de la crise sanitaire. En accélération constante depuis la dernière semaine de février, la mortalité due au coronavirus va battre tous les records en mars depuis le début de la pandémie, il y a un an.

Selon les données du ministère de la Santé considérées comme sous-estimées par de nombreux scientifiques, 2009 nouveaux décès ont été enregistrés mercredi, ce qui porte le total des morts de la COVID-19 à 300 685.    

Derrière les États-Unis, le Brésil est le deuxième pays le plus endeuillé au monde et a enregistré près de 90 000  cas supplémentaires de contamination en 24 heures. En un an, 12,2 millions de personnes ont été infectées dans le pays de 212 millions d’habitants.

La flambée actuelle de COVID-19 au Brésil suscite une inquiétude croissante chez ses voisins latino-américains, mais aussi ailleurs dans le monde, en raison de la propagation du variant amazonien P1, qui serait plus contagieux et plus létal.

Contrairement à la première vague de 2020, cette deuxième vague affecte gravement tout le pays en même temps. Elle tue aussi des patients plus jeunes.

Dans quasiment tous les États, les services de soins intensifs des hôpitaux sont au bord du point de rupture et leurs personnels à la limite de l’épuisement.

La presse brésilienne a rapporté des situations dramatiques : corps entassés dans les couloirs d’hôpitaux débordés ou décès d’une centaine de personnes faute de lits en soins intensifs dans l’État de Sao Paulo. De même, les stocks d’oxygène comme de kits d’intubation ont atteint par endroits un niveau critique.

Confrontés à l’envolée de la mortalité, et à l’absence d’une politique nationale de lutte contre le virus, de nombreux États et villes ont pris de mesures en ordre dispersé.  

Des couvre-feux ou des restrictions de l’activité comme la fermeture des bars et restaurants ont été décidées, comme à Sao Paulo et Rio de Janeiro, mais très tardivement pour les épidémiologistes.

Ces deux métropoles du Sud-est ont annoncé des jours de congés anticipés pour la semaine prochaine dans l’espoir de limiter les déplacements et le brassage de leurs populations.

« Situation compliquée »

Mercredi, le président Jair Bolsonaro a mis sur pied un comité de crise pour lutter contre la COVID-19, face aux critiques sur sa désinvolture vis-à-vis de la crise sanitaire.

« Le sentiment qui prévaut, c’est la solidarité pour minimiser les effets de la pandémie. La vie avant tout », a déclaré le dirigeant d’extrême droite, au lendemain du jour où le Brésil avait enregistré plus de 3000 décès en 24 heures, un record.  

Changeant de pied alors qu’il a jusqu’ici dénigré les confinements, la distanciation sociale et, récemment, jusqu’aux vaccins, Jair Bolsonaro a estimé que le Brésil devait « sortir de cette situation compliquée […] sans conflit, sans politisation ».

Mais pour ses détracteurs, cette initiative visant à coordonner au niveau national les mesures anticovid arrive trop tard.

« Pendant 12 mois, Bolsonaro a minimisé la pandémie, provoqué des rassemblements, s’est prononcé contre l’usage de masques et a saboté les négociations pour l’acquisition de vaccins », a résumé le quotidien Folha de S. Paulo dans un éditorial.

Mardi, dans une allocution où, fait rare, il exprimait un peu d’empathie pour « tous ceux qui ont perdu un proche », le président avait promis aux Brésiliens qu’avec 500 millions de doses ils seraient tous vaccinés avant la fin de l’année.

Mais deux mois après son lancement, la vaccination progresse lentement dans ce pays qui était un modèle des campagnes vaccinales : seulement 3,7 millions de Brésiliens ont reçu deux doses en raison de problèmes logistiques et du manque de vaccins.  

Le nouveau ministre de la Santé, Marcelo Queiroga – le 4e en un an de crise sanitaire – a promis de tripler « à court terme », à un million par jour, le nombre de vaccinations dans ce pays où la population adhère massivement aux vaccins.