(Bogota) Des manifestations massives ont à nouveau eu lieu en Colombie mercredi, à la veille de négociations avec le gouvernement pour trouver une issue à la crise sociale initiée le 28 avril et avivée par la répression policière.

Des milliers de personnes sont descendues dans les rues de Bogota, Cali, Medellin et d’autres villes pour exiger des politiques plus solidaires face à la crise économique, aggravée par la pandémie de COVID-19.

Cette nouvelle journée de mobilisation a précédé une réunion prévue jeudi, la troisième entre le gouvernement et le Comité national de grève, initiateur du mouvement, sans en représenter tous les secteurs.

La crise a éclaté contre un projet de hausse des impôts, depuis retiré, mais a été attisée par les violences qui ont fait au moins 42 morts, pour la plupart civils, et plus de 1700 blessés, selon les autorités.

Les premières conversations s’étaient tenues en début de semaine. Mais les parties restent divisées quant aux excès des forces de l’ordre, dénoncés par plusieurs pays, l’ONU, l’Union européenne, ainsi que des ONG internationales et locales.

Le président Ivan Duque a promis la gratuité des frais à l’entrée dans les universités publiques pour les plus modestes, et des facilités de crédits au logement pour les jeunes.  

Mais il se refuse à admettre une répression généralisée et s’est limité à condamner des « cas » isolés d’abus policiers, tout en dénonçant le « vandalisme » et les barrages routiers, causes de destructions et de pertes économiques importantes, surtout dans le sud-ouest du pays.  

Et les manifestations se succèdent presque chaque jour, alors que le pays traverse une 3e vague de pandémie, avec déjà plus de trois millions de cas, dont près de 83 000 décès.  

Son prédécesseur et Prix Nobel de la Paix, Juan Manuel Santos, a appelé le gouvernement à assumer les excès des forces de l’ordre. « Nous avons besoin de davantage de gestes, nous avons besoin que les différentes parties montrent plus d’empathie et plus d’humilité, que l’État admette “Nous avons commis des abus” », a-t-il déclaré à W Radio.  

Le gouvernement « prolonge les négociations, en ignorant les propositions et la clameur du peuple, et en plus il l’attaque », a déclaré Viviana Clemente, une commerçante de 41 ans qui manifestait à Bogota.

Le ministre de la Défense, Diego Molano, devra répondre devant le Congrès pour les morts et ses « omissions à ce poste », a estimé le leader syndical Francisco Maltés, favorable à une motion de censure prévue le 25 mai.

Le chef de l’État « parie sur l’usure de la protestation […] Il se trompe ! », a tweeté pour sa part la leader étudiante Jennifer Pedraza.

La crise s’est étendue au football, alors que la Colombie doit accueillir la Copa América dans moins d’un mois conjointement avec l’Argentine, des partisans dénonçant « la coupe de sang » devant le stade El Campin, à Bogota.