(Brasilia) Un mois après le lancement de sa campagne nationale de vaccination chaotique et déjà freinée par le manque de doses disponibles, le Brésil a autorisé mardi de manière définitive l’utilisation du vaccin contre la COVID-19 de Pfizer/BioNTech.

L’agence régulatrice Anvisa a précisé dans un communiqué qu’il s’agissait de la « première autorisation définitive pour l’utilisation à grande échelle d’un vaccin dans les Amériques ».

Aux États-Unis, le vaccin de Pfizer/BioNTech a été autorisé en décembre dernier, mais titre d’urgence. Cependant, cela n’empêche pas dans la pratique sa distribution dans tout le pays, la seule restriction étant l’exclusion des moins de 16 ans de la vaccination.

Campagne chaotique

Le Brésil, deuxième pays le plus endeuillé au monde par le virus, avec plus de 247 000 morts, n’a pas encore reçu la moindre dose de ce vaccin déjà utilisé massivement aux États-Unis, mais aussi en Europe.

Pour sa campagne de vaccination, débutée tardivement et de façon erratique, ce pays de 212 millions d’habitants ne dispose pour le moment que des vaccins du laboratoire chinois Sinovac et d’AstraZeneca/Oxford, approuvés en urgence en janvier. Une polémique entre Brasilia et l’américain Pfizer avait empêché un accord l’an dernier.

Selon les règles de l’Anvisa, l’autorisation d’urgence au Brésil ne porte que sur l’immunisation de certains groupes définis comme prioritaires.

L’autorisation définitive, elle, permet l’utilisation du vaccin pour l’ensemble de la population, et la commercialisation des doses.

« L’efficacité et la sécurité du vaccin de Pfizer/BioNtech ont été vérifiées par l’équipe technique de l’Anvisa », a assuré l’agence régulatrice dans un communiqué.

« Nous espérons que d’autres vaccins seront bientôt approuvés », a-t-elle ajouté.

En un peu plus d’un mois, quelque six millions de Brésiliens ont reçu une injection et 1,3 million les deux doses pour être immunisés.

Mais plusieurs grandes villes, dont Rio de Janeiro et Salvador de Bahia, ont dû interrompre la vaccination en l’absence de doses disponibles.

Le Brésil misait sur le vaccin AstraZeneca

Il y a une semaine, le ministre de la Santé a présenté un calendrier détaillé des prévisions de livraison de 230 millions de doses d’ici juillet, sans inclure celui de Pfizer/BioNTech.

Pour ce dernier, contrairement aux vaccins de Sinovac et d’AstraZeneca/Oxford, le Brésil n’a pas noué d’accord de transfert de technologie permettant de fabriquer les doses sur place.

« C’était une erreur de la part du gouvernement de mettre tous ses œufs dans le même panier », a confié à l’AFP Ethel Maciel, épidémiologiste de l’Université de l’État d’Espirito Santo.

Pendant longtemps, le gouvernement Bolsonaro ne misait que sur le vaccin AstraZeneca/Oxford, le chef de l’État ayant critiqué à plusieurs reprises le « vaccin chinois » de Sinovac, dont la distribution au Brésil est le fruit d’un partenariat avec le gouverneur de Sao Paulo, Joao Doria. Celui-ci est pressenti comme un des adversaires de Jair Bolsonaro pour la présidentielle de 2022.

C’est pourtant avec le Coronavac de Sinovac que la première vaccination au Brésil a eu lieu, le 17 janvier, à Sao Paulo.

Pfizer voulait une clause de non-responsabilité

Pfizer a révélé en janvier avoir proposé dès le mois d’août 2020 quelque 70 millions de doses au Brésil, mais Brasilia avait rejeté la clause de non-responsabilité.

Seuls le Brésil, l’Argentine et le Venezuela auraient refusé cette clause, selon un parlementaire brésilien cité par le journal O Globo.

Le président Jair Bolsonaro s’était opposé à cette clause.

« Dans le contrat de Pfizer, c’est très clair : “nous ne sommes pas responsables de quelconques effets secondaires”. Si tu te transformes en crocodile, c’est ton problème », avait lancé le dirigeant d’extrême droite, qui n’a cessé de minimiser la pandémie et assuré qu’il ne se ferait pas vacciner.

« Si tu deviens superman, si une femme commence à avoir de la barbe qui pousse ou si un homme commence à parler avec une voix efféminée, ils (les pharmaceutiques) n’ont rien à voir avec ça », avait-il ajouté.