(Guatemala) Des centaines de Guatémaltèques ont mis le feu samedi au Parlement pour protester contre le budget 2021, au moment où des manifestants exigeaient la démission du président Alejandro Giammattei.

Des flammes gigantesques ont ravagé l’intérieur du bâtiment, dont la façade était constellée de graffitis antigouvernementaux. La Croix-Rouge a soigné plusieurs personnes intoxiquées par les fumées, selon un porte-parole de l’organisation, Andrés Lemus.

Lors de la manifestation devant le Congrès, la police a interpellé plus d’une vingtaine de personnes.  

« Je marchais et ils m’ont attrapé, je n’ai rien fait, j’ai mon droit constitutionnel de faire la grève », criait un manifestant escorté par deux membres casqués des forces de l’ordre.

Près d’une cinquantaine de personnes ont été hospitalisées pour blessures, dont une dans un état grave.

Le groupe ayant mis le feu au bâtiment a agi alors qu’une manifestation pacifique avait lieu devant l’ancien palais du gouvernement, dans le centre historique de la capitale et à proximité du Congrès, pour exiger la démission du chef de l’État, un médecin de 64 ans au pouvoir seulement depuis janvier.

Exhibant des drapeaux bleus et blancs du pays, les manifestants brandissaient des banderoles ornées des slogans « plus de corruption » ou « Giammattei out ».

Les forces de l’ordre ont lancé des gaz lacrymogènes sur la foule au sein de laquelle des enfants ont été pris de panique, selon des images diffusées sur les réseaux sociaux. Des manifestants jetaient des pierres sur les forces de l’ordre. Un homme a été emporté sur un brancard, du sang coulant sur son visage.

« Le Guatemala pleure du sang, les gens en ont assez d’être piétinés depuis plus de 200 ans », s’est plaint un manifestant, qui n’a pas donné son nom et protège son visage d’un bandana.

« Nous sommes fatigués qu’il n’y ait pas d’autre moyen de montrer notre refus, notre ras-le-bol, nous sommes fatigués de tant d’abus par les autorités », criait une autre manifestante.

Dans un tweet, le président Giammattei a dénoncé l’attaque contre le Congrès et a promis des sanctions pénales pour les coupables. « Je répète que vous avez le droit de manifester conformément à la loi. Mais nous ne pouvons pas permettre le vandalisme de biens publics ou privés », a-t-il déclaré.

Les manifestants reprochent notamment au président d’avoir donné son aval au budget controversé de près de 13 milliards de dollars, le plus important de l’histoire du pays.

Le vice-président veut démissionner

Des Guatémaltèques mécontents dénoncent aussi l’opacité des ressources pour faire face à la pandémie du nouveau coronavirus ou la création d’un poste de super-ministre attribué à un jeune proche du président.  

Dans la nuit de vendredi à samedi, le vice-président du Guatemala lui-même, Guillermo Castillo, avait exhorté le président Giammattei à démissionner avec lui.  

Le parlement, composé pour la plupart de membres du parti au pouvoir et de formations apparentées, a approuvé cette semaine un budget très controversé.  

Des entités économiques et analystes ont mis en garde contre le risque qu’un tiers du budget soit financé par la dette, comme proposé.  

En outre, la plupart des fonds sont destinés à des infrastructures gérées par des entrepreneurs et négligent la lutte contre la pauvreté et la malnutrition infantile, ce qui a suscité des protestations.

Sur près de 17  millions d’habitants du Guatemala, plus de 59 % de la population vit dans la pauvreté et la malnutrition infantile touche près de la moitié des enfants de moins de cinq ans.

Le Congrès a approuvé des prêts de plus de 3,8  milliards de dollars pour faire face à la pandémie de coronavirus, bien que moins de 15 % de ces ressources aient été investies.

La gestion de la crise provoquée par la pandémie a été sévèrement critiquée par les opposants politiques et des secteurs de la société, dénonçant notamment des carences dans les hôpitaux.

Selon les données officielles, le pays a enregistré 11 8417 cas de contaminations et 4074 morts de la COVID-19.