(Caracas) Juan Guaidó a renoncé mercredi à présider une séance du Parlement dans l’hémicycle, lui préférant une salle de la banlieue de Caracas, après que des élus d’opposition ont affirmé que des « paramilitaires » soutenant le président Nicolas Maduro ont « tiré » sur leur voiture.  

« C’est un attentat fomenté par la dictature », s’est indigné Juan Guaidó, qui tente, sans succès, d’évincer le président socialiste depuis un an. « Il y a un impact de balle sur la fenêtre du conducteur de mon véhicule », a-t-il ajouté.  

PHOTO YURI CORTEZ, AFP

Juan Guaidó sort de sa voiture, qui avait précédemment été attaquée, pour se rendre dans l'amphithéâtre où il devait présider une séance parlementaire en banlieue de Caracas

Lui-même ne se trouvait pas dans la voiture lorsque les coups de feu ont été tirés contre six de ses pairs de l’opposition qui se rendaient au Parlement.

Fort de sa réélection le 5 janvier à la tête du Parlement unicaméral, seule institution contrôlée par l’opposition, Juan Guaidó continue de revendiquer la présidence par intérim du Venezuela, considérant Nicolas Maduro comme un « usurpateur ». Il est reconnu par une cinquantaine de pays, dont les États-Unis.

Les six députés, qui soutiennent Juan Guaidó, ont affirmé avoir été pris pour cible par des « colectivos », des groupuscules fidèles au pouvoir chaviste que l’opposition qualifie de « paramilitaires » violents.  

« Des “colectivos” armés nous tirent dessus », a écrit sur Twitter la députée Delsa Solorzano. Puis à elle a expliqué à la presse : « nous avons été attaqués à coups de pierres et de bâtons et on a tiré sur notre véhicule ».  

Des journalistes de l’AFP présents dans le quartier ont entendu des coups de feu.

On ignorait dans l’immédiat si ces tirs avaient fait des blessés.

Le Syndicat national des travailleurs de la presse (SNTP) a, quant à lui, dénoncé des agressions contre les journalistes présents près du Parlement de la part de « “colectivos” et de sympathisants » de Nicolas Maduro.

Le gouvernement et les forces de l’ordre n’avaient pas réagi dans l’immédiat.

L’équipe de Juan Guaidó a diffusé des photos d’une voiture blanche et d’autres véhicules endommagés par cet « attentat ».  

Selon Delsa Solorzano et plusieurs autres députés, les « colectivos » étaient présents en nombre dans les environs du Parlement mercredi matin pour empêcher les élus, dont Juan Guaidó, d’atteindre le bâtiment.

« Nous siègerons autre part »

L’opposant comptait présider une séance parlementaire consacrée à la Journée des instituteurs et institutrices.  

Mais au vu des nombreux soldats et policiers déployés près du bâtiment et de la présence des « colectivos », des députés, dont Delsa Solorzano, ont d’abord tenté de se rendre sur place pour voir si le chef de file de l’opposition pourrait atteindre l’hémicycle, avant d’être pris pour cible.

Juan Guaidó et une petite centaine de députés d’opposition ont finalement décidé de siéger dans une salle d’El Hatillo, dans la banlieue de Caracas.

PHOTO MATIAS DELACROIX, AP

Au même moment avait lieu une séance de l’Assemblée nationale constituante. Elle se réunit dans le même Palais fédéral législatif que le Parlement que préside Juan Guaidó.

« Nous allons siéger autant de fois que cela sera nécessaire pour protéger cet espace », a déclaré Diosdado Cabello, président de la Constituante, durant la séance. Il a convoqué une nouvelle séance jeudi.

La Constituante est entièrement acquise au pouvoir chaviste et son président est le numéro deux du parti présidentiel, le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV). Cette assemblée exerce les fonctions législatives depuis trois ans, puisque toutes les décisions prises par l’Assemblée nationale sont annulées par la justice.

« S’ils nous empêchent l’accès (au Parlement, NDLR), comme ils sont en train de le faire, nous siègerons autre part », a réagi le député d’opposition Carlos Prosperi.

Juan Guaidó a été reconduit à la présidence du Parlement le 5 janvier par cent députés d’opposition. Dans la foulée, il a été félicité par ses alliés américains et l’Union européenne.

Mais sa reconduction a été mouvementée. Le même jour, Luis Parra, un député d’opposition rival, s’est proclamé président du Parlement avec le soutien des élus chavistes. A ce moment-là, Juan Guaidó était absent de l’hémicycle, retenu à l’extérieur par la police et l’armée.