Après plusieurs jours de blocage, le gouvernement nicaraguayen a cédé aux exigences de l'opposition : il va libérer sous trois mois tous les opposants incarcérés pour relancer le dialogue avec le camp adverse.

« La table de négociation a reçu une annonce du gouvernement concernant la libération sous 90 jours de tous les détenus dans le cadre des manifestations » contre le pouvoir, a annoncé mercredi soir l'envoyé spécial de l'Organisation des États américains (OEA), Luis Angel Rosadilla, lors d'une conférence de presse.

Il s'agissait d'une condition sine qua non des adversaires du président Daniel Ortega pour s'asseoir de nouveau à la table des négociations.

Pour l'heure, le nombre de prisonniers qui seront libérés n'avait pas été précisé.  

Un peu plus de 800  opposants sont emprisonnés, a annoncé mercredi l'opposition, qui a revu son chiffre à la hausse. Elle parlait jusqu'ici de 700 détenus. De son côté, le gouvernement n'avait pas encore communiqué de chiffre.

Le processus de libération pourrait débuter dès cette semaine « et il n'y aura plus de détenus au-delà de 90 jours », a affirmé le chef d'entreprise José Aguerri, membre de la plateforme d'opposition Alliance civique pour la justice et la démocratie (ACJD).

Le Comité international de la Croix rouge (CICR) va accompagner cette étape, selon l'accord conclut mercredi entre les deux camps.  

Les parties ont également convenu d'un programme de négociations en six points et de faire appel à la communauté internationale pour suspendre les sanctions, selon la déclaration conjointe publiée par la présidence.

Violente répression-

« Au moment souhaité, d'un commun accord entre les parties, il sera demandé à la communauté internationale de suspendre les sanctions pour faciliter le développement humain, économique et social du Nicaragua, au bénéfice des secteurs les plus vulnérables de la population », selon l'accord.  

Le Nicaragua est la cible de sanctions des États-Unis et se trouve dans le collimateur de l'Union européenne (UE), qui menace également d'infliger des sanctions et demande la libération des opposants détenus.  

« Les conditions ne sont pas réunies pour poursuivre la négociation » avec le gouvernement, déclarait encore mardi Azahalea Solis, membre de la délégation de l'ACJD qui avait suspendu lundi sa participation aux pourparlers, relancés le 27 février après plusieurs mois d'interruption.

L'opposition dénonçait notamment la violente répression qui s'est abattue samedi à Managua contre des manifestants qui s'apprêtaient à défiler pour réclamer la libération des « prisonniers politiques », et contre les journalistes venus couvrir l'événement. Une centaine de protestataires ont été interpellés quelques heures, après avoir été violemment pris à partie par des policiers antiémeutes déployés dans la capitale.

La libération conditionnelle de 150 opposants depuis la reprise du dialogue fin février était considérée comme « insuffisante » par l'opposition.

Le Nicaragua connaît une grave crise politique depuis onze mois, lorsque des manifestations ont éclaté contre le gouvernement du président Daniel Ortega, 73 ans.

Après avoir dirigé le pays de 1979 à 1990 à l'issue de la révolution sandiniste, Daniel Ortega était revenu au pouvoir en 2007.

Les opposants accusent l'ex-guérillero sandiniste d'avoir instauré une dictature. Ils réclament son départ et celui de la vice-présidente, son épouse Rosario Murillo.  

Le chef de l'État dénonce de son côté une tentative de putsch de l'opposition avec le soutien de l'Église et de Washington.

La crise a fait plus de 325 morts et a plongé le pays dans la récession économique.