Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a exhorté vendredi le Venezuela « à ne pas recourir à la force létale contre les manifestants », alors que des violences sont craintes samedi lors d'un acheminement d'aide humanitaire américaine dans ce pays.

Cet appel est formulé dans un communiqué publié après une rencontre au siège de l'ONU-la troisième depuis début février-avec le chef de la diplomatie vénézuélienne, Jorge Arreaza, organisée à la demande de ce dernier.

La veille, Antonio Guterres avait reçu à New York le secrétaire d'État américain Mike Pompeo, aussi à la demande de celui-ci. Comme pour Caracas, il lui a transmis un « appel fort à éviter la violence », selon l'ONU.

Soutenu par Washington, l'opposant vénézuélien Juan Guaidó a promis qu'une aide humanitaire d'urgence entrerait coûte que coûte samedi au Venezuela. Appuyé par la Russie, le président vénézuélien Nicolas Maduro s'y oppose, y voyant les prémisses d'une action militaire pour le renverser.

Des heurts vendredi avec l'armée vénézuélienne ont fait deux morts à la frontière avec le Brésil.

Jusqu'à présent, le patron de l'ONU résiste aux pressions pour prendre parti. Il a offert ses bons offices pour une médiation, sous condition d'un accord entre les deux camps opposés.

Sans viser explicitement quiconque, M. Guterres a aussi fait savoir ces derniers jours son opposition à toute « politisation » de l'aide humanitaire. « L'aide humanitaire doit être utilisée de manière impartiale [...] et sans objectif militaire », a insisté vendredi son porte-parole, Stéphane Dujarric.

Dans son communiqué, le secrétaire général souligne que « l'ONU continuera à agir en accord avec les principes humanitaires d'humanité, de neutralité, d'impartialité et d'indépendance » au Venezuela. Elle y travaillera « avec les institutions vénézuéliennes pour aider la population dans le besoin », a-t-il précisé.

Jorge Arreaza a présidé vendredi à l'ONU une réunion à laquelle avaient été conviés une soixantaine de pays (outre la Russie et la Chine, notamment la Corée du Nord, Cuba, l'Iran, la Birmanie, le Nicaragua ou la Syrie), membres d'un groupe créé la semaine dernière à l'ONU pour défendre la Charte des Nations unies.

Ces pays estiment que ses principes sont bafoués par les Occidentaux dans le dossier vénézuélien et d'autres.

« Ce groupe a été créé pour arrêter la guerre et nous prévoyons différentes actions dans différents lieux à l'ONU et aussi à Genève et en dehors de l'ONU », a indiqué le ministre vénézuélien.

« Nous sommes très préoccupés à l'idée que demain quelque chose se passe qui entraîne des évènements imprévisibles », a déclaré l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassily Nebenzia. « Nous prions pour qu'il n'y ait pas de violences » et « le début d'une guerre civile au Venezuela ».

Au Conseil de sécurité, deux projets de résolution, l'un porté par les États-Unis, l'autre par la Russie, restent en souffrance depuis début février. Aucun vote n'a encore été demandé mais les deux textes semblent voués à l'échec.

Menacé d'un veto russe et éventuellement chinois, le projet de Washington appelle à faciliter une aide humanitaire internationale et à organiser un scrutin présidentiel. Visant implicitement les États-Unis, le texte russe dénonce les menaces de recourir à la force contre Caracas.