L'Europe doit être ferme face à la «dictature» de Nicolas Maduro, ont plaidé mercredi à Strasbourg les opposants vénézuéliens Julio Borges et Antonio Ledezma, en recevant leur prix Sakharov pour la «liberté de pensée», décerné par le Parlement européen.

«Nous demandons officiellement qu'une mission du Parlement européen» soit dépêchée au Venezuela pour observer le prochain scrutin présidentiel, prévu en 2018, a expliqué devant les eurodéputés Julio Borges, le président du Parlement vénézuélien -- contrôlé par l'opposition, mais aux pouvoirs très limités par le camp présidentiel.

Le président Nicolas Maduro a affirmé que les principaux partis d'opposition seraient exclus de la prochaine élection présidentielle, en raison de leur boycottage du scrutin municipal de dimanche, et que le pouvoir chaviste a largement remporté.

Le régime de Nicolas Maduro «a séquestré la démocratie dans mon pays, il a instauré la faim, détruit le système de santé, exproprié des milliers d'entreprises», a énuméré à Strasbourg M. Borges, fustigeant un «État totalitaire, un deuxième Cuba».

De son côté l'ancien maire de Caracas Antonio Ledezma a lu devant les parlementaires européens le message d'un autre leader de l'opposition, Leopoldo Lopez, en résidence surveillée depuis juillet: «Nous demandons à l'Europe qu'elle reste ferme dans son engagement pour que soient libérés plus de 300 prisonniers, ainsi que 30 millions de Vénézuéliens qui aujourd'hui ne jouissent pas de la liberté».

M. Ledezma avait fait le déplacement à Strasbourg (est de la France) un mois après avoir fui son assignation à résidence à Caracas. Il s'est depuis installé en Espagne.

Pour le président du Parlement européen, Antonio Tajani, qui a remis le prix aux deux représentants de l'opposition, «la situation des droits de l'homme se dégrade de jour en jour» au Venezuela. «Nous voulons que ce pays retrouve la démocratie, la dignité et la liberté», a souligné M. Tajani, un conservateur libéral, en dédiant le prix à «tous les Vénézuéliens dans le monde».

Habituellement plutôt consensuel, le choix du lauréat de ce prix prestigieux, annoncé en octobre, a fait grincer des dents cette année au sein de l'hémicycle strasbourgeois: si les élus conservateurs et libéraux ont pesé pour récompenser l'Assemblée nationale vénézuélienne -- seule institution dominée par l'opposition -- ainsi qu'une liste de prisonniers politiques, certains eurodéputés écologistes ou de la gauche radicale se sont désolidarisés de cette décision.

Des élus espagnols d'extrême gauche ont ainsi expliqué qu'ils préféraient ne pas assister à la cérémonie de mercredi. Selon eux, les lauréats du Prix Sakharov 2017 constituent une opposition non pas «démocratique», mais «violente», qui «cherche depuis 2002 à renverser par des coups d'État les gouvernements élus démocratiquement».