Des militaires canadiens ont participé à la saisie d'une demi-tonne de cocaïne, la semaine dernière, dans l'est de l'océan Pacifique, a appris La Presse. Cette saisie est intervenue dans le cadre d'une opération antidrogue conjointe avec la Garde côtière des États-Unis.

L'abordage s'est déroulé en pleine nuit, le 31 octobre, dans les eaux internationales au large de l'Amérique centrale.

Les militaires canadiens et les agents de la Garde côtière des États-Unis à bord du navire canadien de Sa Majesté (NCSM) Nanaimo ont intercepté une embarcation de contrebandiers qui transportait 478 kilogrammes de cocaïne.

« Nous sommes arrivés par surprise, ils ont pensé que nous étions d'autres personnes », raconte le commandant du Nanaimo, à qui La Presse a pu parler, hier, alors que l'équipage faisait escale dans un port de la côte ouest de l'Amérique centrale.

Les Forces armées canadiennes ont demandé à La Presse de ne pas révéler dans quel pays se trouve leur navire, pour des raisons stratégiques, de même que l'identité des militaires à bord, pour des raisons de sécurité.

« Il y a beaucoup de risques pour les gens déployés », explique le major Adam Thomson, porte-parole des Forces armées canadiennes, qui évoque notamment des craintes de représailles des « cartels de la drogue » contre les membres des Forces armées et leurs familles.

Drogue cachée

L'embarcation interceptée la semaine dernière est un panga, bateau de pêche d'une dizaine de mètres de long couramment utilisé par les contrebandiers.

Il y avait « un petit peu » de drogue sur le pont de l'embarcation, raconte le commandant du Nanaimo, mais c'est en perçant des trous afin d'y introduire une caméra miniature que les agents de la Garde côtière ont découvert l'essentiel de la cargaison, dissimulée sous ce qui était en réalité un double pont.

Les militaires canadiens ignorent pour l'instant d'où provenait la drogue saisie, mais les contrebandiers se dirigeaient manifestement « vers quelque part au Mexique », affirme le commandant.

Les trois personnes qui se trouvaient à bord n'ont pas tenté de fuir et n'ont pas offert de résistance, ce qui est pratiquement toujours le cas, selon le commandant, car l'inverse entraîne des « conséquences [qui] deviennent vite énormes ».

Elles ont été placées en détention, tandis que leur embarcation a été coulée sur place, mesure fréquente lorsque la Garde côtière ne juge pas pertinent de la remorquer afin de mener des expertises approfondies.

OPÉRATION CARIBBE-MARTILLO

Les Forces armées canadiennes participent depuis 2006 à la lutte contre le trafic de drogue dans les Caraïbes et dans l'est du Pacifique, en envoyant des navires, des hélicoptères et des avions ; ces déploiements ont été baptisés opération CARIBBE.

14: Nombre de pays participants à l'opération Martillo, qui est sous commandement étatsunien, et au sein de laquelle ces effectifs canadiens sont déployés

Le NCSM Nanaimo, qui est arrivé dans la zone à la mi-octobre, est le troisième navire militaire canadien à y participer cette année, après le NCSM Ottawa, au printemps, et le NCSM Saskatoon, en septembre.

Le NCSM Moncton sera également bientôt mis à contribution, pour sa part du côté des Caraïbes, tandis qu'un aéronef CP-140 Aurora de l'Aviation royale canadienne sera aussi déployé ; ils resteront sur place jusqu'à la mi-décembre.

« La plupart de nos réussites surviennent quand on a la collaboration d'un aéronef », souligne le commandant du Nanaimo, car « nous sommes à la recherche de petites embarcations qui sont difficiles à trouver » dans l'étendue de l'océan.

L'essentiel de la drogue saisie - ou « interceptée », quand les contrebandiers la jettent par-dessus bord avant que les autorités n'abordent leur embarcation - est de la cocaïne, mais de la marijuana est souvent trouvée aussi.

Aurait-elle fait son chemin jusqu'au Canada, si les contrebandiers n'étaient pas tombés dans les filets des autorités ?

« Impossible de [le] dire », reconnaît le commandant du NCSM Nanaimo, qui s'empresse d'ajouter qu'il y a toutefois « un problème majeur de cocaïne en Amérique du Nord ».

Mais la raison d'être de l'opération Martillo est aussi de « limiter les impacts du trafic de drogue » dans les pays où elle est produite, en minant les finances des cartels de la drogue et ainsi leur capacité à se mêler des affaires de l'État, explique le commandant du Nanaimo, concluant que « la narco-influence peut être très impressionnante ».

Photo fournie par les Forces armées canadiennes

Les contrebandiers arrêtés au large de la côte ouest de l'Amérique centrale transportaient 478 kilogrammes de cocaïne.

SAISIES EFFECTUÉES DANS LE CADRE DE L'OPÉRATION CARIBBE

• 2016: 5700 kg de cocaïne et 1500 kg de marijuana saisis ou interceptés

• 2015: 18,5 tonnes de cocaïne et 3 tonnes de marijuana saisies ou interceptées*

• 2014: 5380 kg de cocaïne et 540 kg de marijuana saisis ou interceptés

• 2013: 6400 kg de cocaïne saisis ou interceptés

• 2012: 8060 kg de cocaïne saisis ou interceptés

* Un nombre plus élevé de navires, d'avions et d'hélicoptères ont participé aux opérations en 2015

SOURCE: FORCES ARMÉES CANADIENNES