Chars débarquant sur la plage, hélicoptères survolant un barrage, tireurs d'élite en tenue de camouflage: l'armée vénézuélienne était mobilisée samedi et dimanche pour des exercices militaires en réponse à la «menace» du président américain Donald Trump.

À Caracas, où forces de l'ordre et miliciens ont défilé, des partisans du gouvernement vêtus de rouge s'essayaient au maniement du fusil ou aux techniques de combat.

«Yankees, hors d'ici!», vocifère Erica Avendaño, 60 ans, en frappant deux mannequins à l'aide d'un long fusil trop lourd pour elle. «J'espère qu'il ne se passera rien, mais nous sommes prêts à tout» !

Un peu plus loin, Alicia Rosales, 63 ans, est assise aux commandes d'un canon antiaérien, qu'elle fait tourner dans un sens puis dans l'autre, le canon vers le ciel. «C'est comme conduire une auto-tamponneuse», sourit-elle.

Un peu plus tôt, le chef de l'État vénézuélien Nicolas Maduro et son ministre de la Défense Vladimir Padrino Lopez ont donné le coup d'envoi de ces manoeuvres baptisées «Souveraineté bolivarienne 2017» auxquelles doivent participer au cours du week-end quelque 200 000 soldats et 700 000 miliciens, réservistes et civils armés.

«Au peuple et à la FANB (armée vénézuélienne), prenez en charge la défense du territoire et de la souveraineté», a écrit M. Maduro sur Twitter.

Après des exercices de tir samedi, des manoeuvres de combat étaient prévues dimanche, selon le ministre.

«Ce sera un exercice très bénéfique pour la défense intégrale du pays» face à l'«agression de l'empire», a déclaré le ministre.

Cette démonstration de force avait été ordonnée mi-août par le chef de l'État socialiste en réponse à la déclaration de Donald Trump évoquant «une possible option militaire si nécessaire» au Venezuela. Nombre de pays d'Amérique latine avaient rejeté la perspective d'un recours à la force.

Vendredi, la Maison-Blanche a écarté toute action militaire américaine au Venezuela à court terme.

En revanche, déterminé à démontrer que les États-Unis ne resteraient pas immobiles face à la crise dans ce pays, le président Trump a signé vendredi un décret interdisant d'acheter de nouvelles obligations émises par le gouvernement du Venezuela ou par la compagnie pétrolière nationale PDVSA.

Riche en ressources pétrolières mais pauvre en liquidités, le pays, dont la dette est estimée à plus de 100 milliards de dollars, redoute le spectre d'un défaut de paiement.

Le décret ne mentionne cependant pas une quelconque interdiction à des compagnies américaines d'acheter du brut vénézuélien. «Ces mesures ont été soigneusement calibrées pour priver la dictature Maduro d'une source cruciale de financement», a souligné la Maison-Blanche.

«Propagande»

M. Maduro a convoqué vendredi pour une réunion urgente les entreprises américaines qui achètent du pétrole au Venezuela afin d'analyser les sanctions imposées à Caracass. Le pays sud-américain vend aux États-Unis 800 000 des 1,9 million de barils de sa production quotidienne.

Les exercices militaires du week-end relèvent d'une «propagande» dont «Maduro a besoin», estime Rocio San Miguel, experte en questions militaires.

Le président en a besoin en interne «pour élever le coût d'une quelconque trahison au sein de l'armée, une perspective qui inquiète les services de renseignements», et en externe, «pour réaffirmer le discours anti-impérialiste qui trouve un certain écho en Amérique latine», déclare-t-elle à l'AFP.

L'armée est le principal soutien du gouvernement vénézuélien, lequel lui a conféré un grand poids politique et économique.

L'opposition vénézuélienne a appelé à plusieurs reprises ces derniers mois l'armée à rejoindre sa cause. Mais à l'exception de quelques actions isolées, les forces armées sont jusqu'ici restées loyales à M. Maduro.

Selon lui, les sanctions américaines de vendredi ont été demandées par la droite vénézuélienne, pour déstabiliser encore un peu plus le pays.

Très critiqué, Nicolas Maduro est confronté depuis début avril à une violente vague de contestation qui a fait au moins 125 morts et des milliers d'arrestations.

L'opposition considère le président vénézuélien comme responsable de la grave crise économique que traverse le pays. Elle lui reproche également d'avoir fait élire une assemblée constituante «fantoche», fin juillet. Cet organisme s'est emparé des pouvoirs législatifs de l'assemblée nationale, la seule institution du pays contrôlée par l'opposition depuis la fin 2015.