Les États-Unis ont porté  un rude coup au camp du président Nicolas Maduro en plaçant sur leur liste noire financière huit membres de la Cour suprême vénézuélienne, accusés d'avoir aggravé la crise politique du pays en affaiblissant l'autorité du Parlement.

Ces juges ont «exacerbé la situation en interférant constamment avec la branche du pouvoir législatif», a déclaré le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin, cité dans un communiqué.

Aux termes des sanctions, les huit juges, dont le président de la Cour suprême du Venezuela, voient leurs éventuels actifs aux États-Unis gelés et ils ne peuvent entrer en relation d'affaires avec des Américains.

Le président américain Donald Trump a par ailleurs qualifié jeudi de «honte pour l'humanité» la crise politique au Venezuela, affirmant que le pays n'avait pas connu pareille situation depuis plusieurs «décennies».

«Les gens ne mangent pas à leur faim. Les gens n'ont pas de nourriture. Il y a une grande violence. Et nous ferons tout ce qui est nécessaire et travaillerons ensemble pour faire tout ce qui est nécessaire pour aider à régler cela (...). Ce qui se passe est vraiment une honte pour l'humanité», a déploré M. Trump.

La France de son côté a appelé à «l'arrêt des violences» et à une «médiation régionale ou internationale crédible».

Pour sa part, Nicolas Maduro a reçu jeudi le soutien du président russe Vladimir Poutine.

Au cours d'un entretien téléphonique, M. Poutine «a souligné le droit du peuple vénézuélien à choisir son destin sans intervention extérieure, face aux forces radicales qui peuvent compter avec le soutien de l'extérieur», selon un communiqué de la diplomatie vénézuélienne.

Par ailleurs, le chef de l'opposition vénézuélienne Henrique Capriles a accusé jeudi les autorités de l'empêcher de quitter le pays, où se poursuit la vague de manifestations émaillées de violences contre le gouvernement.

Cet ancien candidat à la présidentielle, qu'il avait perdue de peu contre le chef de l'État actuel, devait se rendre à New York pour y rencontrer vendredi le Haut commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Zeid Ra'ad Al Hussein.

«On m'a informé que mon passeport a été annulé», a-t-il annoncé via les réseaux sociaux. «Mon passeport est valable jusqu'en 2020. Ce qu'ils veulent, c'est que je n'aille pas aux Nations unies», affirme-t-il, assurant être «retenu» par les autorités. 

44e mort 

«J'espère que la confiscation du passeport d'Henrique Capriles n'est pas une mesure de représailles parce qu'il allait me rencontrer demain à l'ONU», a réagi sur Twitter le Haut commissaire.

Après cet épisode à l'aéroport, M. Capriles a annoncé qu'il retournait à Caracas pour participer à une manifestation dans la capitale contre la «répression brutale».

Des incidents ont éclatés entre les opposants et les forces de l'ordre lors d'un rassemblement à l'est de Caracas, alors que d'autres manifestations avaient lieu dans plusieurs villes du pays.

Le Venezuela est secoué depuis le 1er avril par une vague de manifestations et de violences dont le bilan s'établit désormais à 44 morts, dépassant celui de la précédente grande série de protestations anti-Maduro entre février et mai 2014, selon le parquet.

La toute dernière victime est un commerçant de 48 ans, décédé mercredi après avoir été touché au cou par un tir d'un garde mobile lors d'une manifestation dans l'État de Tachira (ouest), a annoncé jeudi le ministère public, précisant que trois agents avaient été arrêtés.

Déterminée à obtenir le départ du président via des élections générales anticipées, l'opposition, majoritaire au Parlement depuis fin 2015, ne faiblit pas et mobilise chaque jour des milliers de personnes.

La colère populaire est alimentée par la profonde crise économique et sociale frappant ce pays pétrolier, ruiné par la chute des cours du brut et frappé par des pénuries d'aliments et de médicaments. L'inflation y est la plus élevée au monde et la criminalité incontrôlable.

Depuis le début du mouvement de protestation, les dirigeants de l'opposition dénoncent une «répression brutale» des autorités, tandis que le gouvernement accuse ses adversaires de promouvoir des «actes terroristes» en vue d'un «coup d'Etat».

«Assassin Capriles!» a lancé M. Maduro dans la nuit de mercredi, l'accusant de diriger, avec le président de l'Assemblée nationale Julio Borges, «des bandes de terroristes».

Dans ce climat d'extrême tension, le président a ordonné mercredi le déploiement de 2600 militaires dans l'État de Tachira, près de la frontière colombienne, après des pillages et attaques contre des installations de la police et de l'armée.

La veille, il avait une nouvelle fois prolongé l'état d'urgence économique, en vigueur depuis janvier 2016, qui lui permet de restreindre les «garanties» constitutionnelles et de prendre des mesures spéciales d'«ordre social, économique, politique et juridique».