Le président du Venezuela Nicolas Maduro a exigé mardi des excuses des États-Unis et l'annulation des sanctions infligées à son vice-président pour trafic de drogue, dans la première crise diplomatique avec Washington depuis l'arrivée de Donald Trump.

«Sans aucun doute c'est une agression à laquelle le Venezuela répondra pas à pas avec équilibre et fermeté», a déclaré M. Maduro.

Il a annoncé avoir demandé au ministère des Affaires étrangères de remettre une lettre de protestation et d'exiger des États-Unis qu'ils «présentent des excuses publiques (au) vice-président» Tareck El Aissami, considéré comme son probable successeur.

Le dirigeant socialiste a également demandé aux autorités américaines de «se rétracter», donc d'annuler les sanctions financières infligées lundi par le Trésor au numéro deux du Venezuela.

M. El Aissami, 42 ans, a lui qualifié sur Twitter de «misérable et infâme agression» ces sanctions, disant les recevoir «comme une reconnaissance de (sa) condition de révolutionnaire anti-impérialiste».

Les relations entre Washington et Caracas sont tendues depuis l'arrivée au pouvoir en 1999 d'Hugo Chavez, célèbre pour ses diatribes anti-américaines. Les tensions se sont poursuivies avec l'élection en 2013 de son successeur Nicolas Maduro, tout aussi virulent contre «l'empire».

M. Maduro était pourtant resté prudent ces derniers mois vis-à-vis de Donald Trump, prenant même sa défense en estimant qu'il était victime d'une «campagne de haine».

Mais lundi le président Trump a exprimé sa «préoccupation» à l'égard de la crise vénézuélienne lors d'un entretien téléphonique avec son homologue colombien Juan Manuel Santos, selon la Maison Blanche.

Avec les sanctions imposées à M. El Aissami - gel des avoirs éventuels aux États-Unis et interdiction de tout échange commercial transitant par la système financier américain -, «le message (...) n'est pas politique ou économique. Il s'agit (de la lutte contre) le trafic de drogue international», avait assuré lundi un haut responsable américain à des journalistes. 

«Un message clair» 

Le nouveau secrétaire du Trésor, Steven Mnuchin, a toutefois souligné mardi que Donald Trump voulait «envoyer un message clair au peuple du Venezuela que les États-Unis sont avec eux».

Le cas de M. El Aissami «pourrait remettre en cause les relations» de Caracas avec «l'unique pays qui paie «cash» au Venezuela pour le pétrole», sa principale richesse, a prévenu mardi Jesus Torrealba, secrétaire exécutif de la Table pour l'unité démocratique (MUD, centre droit), grande coalition d'opposition à M. Maduro.

Ces dernières années, le pays sud-américain s'est écroulé économiquement avec la chute des cours du brut.

Ce n'est pas la première fois qu'un proche du pouvoir vénézuélien est sanctionné aux États-Unis : en novembre, un tribunal fédéral de New York a déclaré coupables de trafic de drogue deux neveux de la Première dame, Cilia Flores. Leur condamnation sera prononcée le 7 mars, chacun risquant au moins 10 ans d'emprisonnement.

Leur jugement avait déclenché la colère de Caracas, Nicolas Maduro dénonçant une «attaque impérialiste».

Cette fois, c'est son successeur probable qui est visé : M. El Aissami, l'un des dirigeants les plus influents du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), au pouvoir depuis 1999, et représentant de l'aile dure.

D'origine syro-libanaise, cet avocat a été nommé vice-président en janvier après une ascension-éclair, démarrée comme simple leader étudiant. M. Maduro lui a confié le pouvoir d'exproprier des biens et de nommer des vice-ministres, le désignant aussi à la tête d'un «commando anti-coup d'État» qui a déjà fait arrêter plusieurs opposants.

«Ne nous laissons pas distraire par ces misérables provocations», a lancé Tareck El Aissami sur Twitter, car «ils ne pourront pas en finir avec notre révolution inébranlable».

Auparavant gouverneur de l'État d'Aragua, considéré comme l'un des plus violents du pays, il a aussi été ministre de la Justice quatre ans à partir de 2008, sous la présidence d'Hugo Chavez aujourd'hui décédé.

Ironie du sort, M. El Aissami s'était fait connaître dans le pays grâce à ses actions contre les cartels de drogue. Mais le Trésor américain affirme qu'il a au contraire «facilité la livraison de drogues au Venezuela» par le biais de son contrôle des décollages d'avions d'une base aérienne vénézuélienne, ainsi que de son contrôle des ports.