Les autorités électorales du Venezuela ont dévoilé mardi un calendrier qui rend quasi impossible la tenue en 2016 d'un référendum révocatoire contre l'impopulaire président Nicolas Maduro, évitant au parti socialiste au pouvoir d'éventuelles élections anticipées.

La dernière étape nécessaire avant d'organiser le référendum, c'est-à-dire la collecte de quatre millions de signatures en trois jours, n'aura lieu au mieux que fin octobre, a prévenu la présidente du Conseil national électoral (CNE) Tibisay Lucena.

La question du calendrier est cruciale pour l'opposition, majoritaire au Parlement et promotrice depuis des mois du projet de référendum: s'il est organisé avant le 10 janvier 2017 et couronné de succès, comme le prédisent les sondages, de nouvelles élections seront organisées.

Au-delà de cette date, le chef de l'État, s'il est battu, pourra désigner son vice-président pour le remplacer, permettant au Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) de conserver le pouvoir.

La date du 10 janvier 2017 correspond au début de la quatrième année de mandat de l'ex-président Hugo Chavez, décédé en 2013, que Nicolas Maduro est en train de compléter, normalement jusqu'en 2019. Car, bien que M. Maduro ait été élu en 2013, le mandat de référence reste celui de son défunt prédécesseur.

Mais le nouveau calendrier dévoilé par le CNE laisse peu d'espoir à l'opposition : «Si toutes les conditions requises établies par la loi sont remplies (...) la collecte de signatures de 20% (de l'électorat, ndlr) aurait lieu fin octobre», a déclaré Mme Lucena.

Ensuite le CNE aura «entre 28 et 29 jours» pour vérifier les signatures et s'il les valide, «le référendum révocatoire sera organisé dans les 90 jours» suivants, a-t-elle indiqué.

Avec ce nouveau calendrier, «le référendum révocatoire pourrait être organisé entre février et mars» 2017, prédit ainsi l'analyste Eugenio Martinez, expert en questions électorales.

«Le référendum révocatoire est repoussé de manière arbitraire», estime José Ignacio Hernandez, spécialiste de droit constitutionnel, et son organisation en 2016 dépend uniquement de «la volonté du CNE de respecter la loi». 

En 2017 non plus? 

L'opposition, réunie dans la coalition de la Table pour l'unité démocratique (MUD, centre droit), accuse le CNE de servir les intérêts du gouvernement en ralentissant le processus. Elle a appelé mardi à une manifestation nationale le 1er septembre pour exiger une date pour la prochaine collecte de signatures.

La présidente du CNE «croit que les Vénézuéliens, nous sommes tous stupides ! Le peuple veut une date et un référendum révocatoire en 2016», s'est exclamé sur Twitter l'ex-candidat à la présidentielle Henrique Capriles, raillant l'«exercice de cynisme et de mensonges de Mme Lucena».

Le chemin vers le référendum, entamé en début d'année, ressemble à une course d'obstacles, l'opposition ayant déjà dû réunir quelque 2 millions de signatures, dont 400 000 ont été validées par le CNE après une longue période d'audit.

Pour révoquer Nicolas Maduro il faudra, lors du référendum, battre son score à la présidentielle de 2013 (7,5 millions de voix).

Selon l'institut Venebarometro, 64% des électeurs (12 millions) voteraient contre lui, dans un climat de profond mécontentement populaire lié à la crise, alors que l'économie de ce pays pétrolier s'est effondrée avec la chute des cours du brut.

«Des millions de Vénézuéliens vont exiger que ce référendum se matérialise», a assuré Julio Borges, chef du groupe parlementaire de l'opposition.

«Le Venezuela est en plein chaos et c'est l'unique opportunité d'en sortir», a-t-il insisté.

Dans le camp gouvernemental, on affirme qu'il n'y aura pas le temps pour un référendum en 2016. Et pour s'en assurer, une véritable offensive judiciaire a été lancée.

Nicolas Maduro lui-même a intenté un recours pour fraude devant le Tribunal suprême de justice (TSJ), que l'opposition accuse également d'être au service de l'exécutif. Au total, environ 8600 recours ont été déposés devant le parquet et le TSJ.

«Légalement et juridiquement, (le référendum) est mort», a tranché mardi le dirigeant chaviste Jorge Rodriguez, chargé par le président de surveiller le processus.

«Nous avions déjà dit qu'il était complètement impossible que les délais soient respectés pour réaliser le référendum révocatoire en 2016 et je suis sûr, en voyant ce qui se passe et la fraude massive commise, qu'il n'y aura pas non plus de référendum en 2017», a-t-il affirmé.