La Colombie a annoncé mercredi l'ouverture de pourparlers de paix avec l'ELN, la seconde guérilla du pays, en parallèle à ceux déjà menés par le gouvernement avec la principale rébellion des FARC, pour mettre fin à plus d'un demi-siècle de conflit armé.

Les parties «ont convenu d'installer un dialogue public pour aborder les points qui seront prévus à l'agenda» des discussions afin de «parvenir à une Colombie en paix», ont déclaré les représentants réunis à Caracas.

Les négociations de paix avec l'ELN se dérouleront sous les auspices de six pays, dont Cuba, la Norvège et le Venezuela - déjà garants des négociations avec les FARC - ainsi que le Brésil, le Chili et l'Équateur, qui en sera le siège principal. La date du début n'a pas encore été définie, selon la présidence colombienne.

«Un processus de paix avec l'ELN signifie que la Colombie a l'opportunité d'en terminer complètement avec 52 ans de conflit armé avec les deux groupes de guérilleros», a résumé Kyle Johnson, analyste à l'International Crisis Group (ICG).

L'ELN - mouvement rebelle inspiré de la révolution cubaine et de Che Guevara, et issu comme les FARC d'une insurrection paysanne en 1964 - a entamé en janvier 2014 un dialogue exploratoire à des pourparlers de paix avec le gouvernement du président Juan Manuel Santos.

L'annonce délocalisée à Caracas a été faite par Frank Pearl, délégué du gouvernement colombien aux pourparlers avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, marxistes), première guérilla du pays avec 7000 combattants, et chargé des discussions préliminaires avec l'ELN (guévariste), qui compte, elle, 1500 hommes armés, selon des sources officielles.

Côté ELN, guérilla également marquée par une forte influence religieuse, Eliecer Herlinton Chamorro Acosta, alias «Antonio Garcia», un de ses leaders, était présent.

Opportunité d'une paix complète

Les discussions confidentielles avec l'ELN se déroulaient en parallèle aux pourparlers menés depuis novembre 2012 à Cuba avec les FARC. Mais le dialogue semblait au point mort ces derniers mois et la seconde guérilla du pays avait repris son offensive.

À la suite d'un attentat à l'explosif contre une brigade de l'armée à Arauca (est) début février, M. Santos avait ordonné «d'intensifier les opérations contre l'ELN», ajoutant qu'elle «se trompe du tout au tout si elle pense qu'avec ce type d'actions militaires, avec des attaques de cette nature, elle ouvrait la voie à la paix».

Puis il avait averti le 20 mars qu'aucun processus de paix formel ne débuterait tant que l'ELN ne libérerait pas deux otages, un militaire et un civil, qu'elle détenait. Le caporal Jair de Jesus Villar, enlevé le 3 février, avait été remis en liberté le lendemain et Ramon José Cabrales, conseiller du département Norte de Santander (nord-est), relâché le 24 mars.

Une polémique a toutefois éclaté cette semaine en Colombie, la famille de cet otage civil ayant admis lundi avoir versé une rançon. «Nous ne voulons pas entrer dans les détails, mais oui, nous avons payé pour la libération de mon fils», a déclaré à l'AFP sa mère Marlene Camacho, sans préciser le montant.

Les autorités ont déploré mardi que cette libération ait eu lieu contre rançon. «Le gouvernement rejette cette attitude de l'ELN (...) de tenter d'en tirer bénéfice alors qu'elle devait assumer un engagement politique pour la libération des otages», a déclaré le ministre de l'Intérieur, Juan Fernando Cristo.

M. Cabrales, 40 ans, a pour sa part jugé dans la soirée qu'«une paix sans l'ELN est comme une table bancale». «Les négociations doivent avoir lieu. Pourvu qu'elles se fassent et que ma libération y ait contribué», a-t-il déclaré à l'AFP.

La guerre colombienne a vu au fil des décennies s'affronter guérillas d'extrême gauche, paramilitaires d'extrême droite et forces armées, sur fond de violences des narcotrafiquants. Le conflit a fait 260 000 morts, 45 000 disparus et 6,6 millions de déplacés, selon des chiffres officiels.