Les députés et sénateurs nouvellement élus ont siégé lundi en Haïti, permettant au Parlement de reprendre vie après un an d'arrêt forcé causé par le report des élections législatives pendant plus de trois ans.

«Pendant que nous sommes là, des gens sont dehors et critiquent notre présence ici dans cette salle mais aussi le déroulement de tout ce qui s'est passé pour nous mener ici», a déclaré Andris Riché, le président du Sénat.

Les scrutins prévus à l'automne 2011 n'ont été organisés qu'en août et novembre 2015, en raison d'une crise profonde entre le président Michel Martelly et l'opposition.

Les nouveaux parlementaires souffrent déjà d'un déficit de crédibilité: le premier tour des législatives, le 9 août 2015, a été émaillé de violences ayant obligé l'annulation des opérations de vote dans près d'un quart des circonscriptions.

Les résultats du second tour, tenu le 25 octobre ont par ailleurs suscité la colère de l'opposition qui accuse le pouvoir en place d'avoir organisé «des fraudes massives».

Les manifestations pour dénoncer le processus électoral se sont multipliées depuis l'été et, lundi, une cinquantaine de personnes ont brièvement protesté devant le siège du Parlement contre la moralité douteuse de certains élus.

Aucune femme n'est par ailleurs recensée parmi les 116 élus à prendre fonction lundi, un grand regret pour Andris Riché «alors que 53% de notre population se composent de femmes, qui assument toutes les responsabilités économiques».

La rentrée parlementaire s'est effectuée sans que la totalité des sièges ne soit pourvue: le deuxième tour pour 26 postes de sénateurs et six de députés se tiendra le 24 janvier.

Cette importante étape dans le retour d'Haïti à l'ordre constitutionnel intervient alors que la campagne présidentielle est, elle, dans l'impasse: le candidat de l'opposition Jude Célestin refuse de participer au second tour, également prévu le 24 janvier, tant que l'administration électorale ne sera pas profondément remaniée.

Au premier tour du scrutin présidentiel, le 25 octobre, Jovenel Moïse, le candidat du pouvoir, avait recueilli 32,76% des voix, contre 25,29% pour Jude Célestin, des résultats qualifiés de «farce ridicule» par ce dernier.

Depuis la fin de la dictature des Duvalier en 1986, Haïti connaît une crise démocratique émaillée de coups d'État et d'élections contestées qui fragilisent le développement économique du pays, encore marqué par le terrible séisme de janvier 2010 qui a fait plus de 200 000 morts.