Le président Raul Castro a rencontré dimanche au Vatican le pape François et l'a remercié «cordialement» de sa «médiation» ayant permis le rapprochement historique avec les États-Unis, a rapporté le porte-parole du petit État.

Cette visite du président de l'île communiste, qui venait de Moscou, a eu lieu un peu plus de quatre mois avant l'étape que fera Jorge Bergoglio en septembre à La Havane, sur sa route qui le mènera aux États-Unis.

Raul Castro, accompagné de son ministre des Affaires étrangères Bruno Rodríguez Parrilla, a été reçu pendant une heure -un temps long pour ce type d'audience- dans un petit salon attenant à la grande salle Paul VI.

«Raul Castro a remercié le pape pour sa médiation entre Cuba et les États-Unis», a rapporté ensuite le porte-parole du Vatican, Federico Lombardi. L'entretien a porté aussi sur le prochain voyage à La Havane.

M. Castro a offert au pape le tableau d'un artiste cubain, Kcho, qui évoque le thème des clandestins naufragés de la mer, cher au pape. Celui-ci a remis à Raul Castro une médaille représentant Saint Martin de Tours, un saint français célèbre pour avoir partagé son manteau avec un mendiant, l'invitant à «vêtir et à promouvoir les pauvres».

Son frère aîné, Fidel, s'était rendu au Vatican en 1996 pour voir Jean-Paul II: visite qui avait préparé le terrain au voyage historique du pape polonais à Cuba deux ans plus tard. Le prélat argentin Jorge Bergoglio accompagnait alors Jean-Paul II.

Le Vatican et François ont joué un rôle important dans le rétablissement des relations diplomatiques entre Cuba et les États-Unis en décembre dernier, après plus de cinquante ans de tensions.

Le Vatican avait révélé une médiation personnelle du souverain pontife, qui avait écrit aux deux chefs d'État. Le Vatican avait aussi reçu discrètement des délégations des deux pays.

Le secrétaire d'État (numéro deux) Pietro Parolin, ancien nonce au Venezuela, et le substitut (numéro trois) Giovanni Angelo Becciu, ancien nonce à La Havane, très bons connaisseurs du dossier, ont préparé le terrain.

«Que le monde s'ouvre à Cuba et que Cuba s'ouvre au monde», avait lancé Jean-Paul II en 1998 à La Havane: des années d'efforts ont porté leurs fruits. Le Saint-Siège est apprécié par le régime communiste, car il l'a toujours appuyé dans sa demande de levée de l'embargo américain.

En contrepartie, dans un ferme soutien à l'Église locale, il a demandé une libéralisation du régime et l'élargissement des prisonniers politiques, souvent des catholiques engagés. Il a aussi maintenu ses distances avec les opposants les plus virulents basés à Miami, qui voulaient un renversement par la force du régime marxiste.

Rôle déterminant de l'Église cubaine

Jorge Bergoglio s'était beaucoup impliqué dans la question cubaine, coordonnant en 1998 la rédaction d'un livre intitulé, «Dialogue entre Jean-Paul II et Fidel Castro».

La lune de miel actuelle est aussi la conséquence du rôle déterminant de l'Église cubaine, et notamment du cardinal de La Havane, Jaime Lucas Ortega, qui se sont imposés comme interlocuteurs obligés du régime, à la fois fermes et prêts à la discussion.

Cuba aura reçu la visite de trois papes en moins de vingt ans, si l'on compte celle de Benoît XVI en 2012, pendant laquelle il s'était entretenu chaleureusement avec Fidel Castro, du même âge que lui.

La médiation entre Cuba et l'administration américaine est un grand succès pour la discrète diplomatie du Saint-Siège. Elle a un fort impact sur le continent latino-américain, majoritairement catholique, d'où vient pour la première fois de l'histoire un pape.

Le Vatican s'est aussi entremis discrètement, sans succès, pour tenter de trouver une issue à la crise politique aiguë au Venezuela. Il s'efforce depuis longtemps d'encourager la réconciliation en Colombie entre le gouvernement et les mouvements de guérilla. Il a réussi une médiation en 1984 entre le Chili et l'Argentine sur leur différend du canal de Beagle.

M. Castro devait s'entretenir ensuite avec le président du Conseil italien Matteo Renzi.